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Actualité - 12.04.2021

Retour sur un dimanche agité

C’est ce qu’on appelle un dimanche chaud, très chaud même. Plusieurs incidents, à la gravité plus moins marquée, ont émaillé différentes réunions de courses au trot ce dimanche. D’un règlement de compte qui nous rappelle a priori l’affaire « Guelpa – Martens » à un accident post-chute en passant par une disqualification sévère qui a fait largement réagir sur les réseaux sociaux, les esprits se sont clairement échauffés.

Thierry Duvaldestin voit rouge

Commençons par l’incident de Rambouillet. Il est aux alentours de 16h quand les chevaux du Groupe B du Prix Dryade des Bois se réunissent pour le départ. Thierry Duvaldestin s’élance du premier échelon au sulky de Gerico de Godrel (Uniclove), Alexis Collette part des 25m avec Gamin Bazoquain (Look de Star). Deuxième virage. Alexis Collette décide de se rapprocher des premiers. Il évolue alors en troisième épaisseur. Mais dans le mouvement, le duo penche sur sa gauche et gène considérablement Gerico de Godrel et Thierry Duvaldestin, lesquels avaient pris cette place tant convoitée du « deux au carré », deuxième ligne-deuxième épaisseur. Le cheval se met au galop et est disqualifié. De quoi mettre Thierry Duvaldestin hors de lui. Le professionnel normand décide alors d’aller dire ce qu’il pense de ce mouvement à son adversaire, dans un premier temps à son extérieur, puis devant lui pour le faire rétrograder au dernier rang en reprenant fortement son cheval. La joute dure toute la
ligne d’en face et bien que bloqué de nouveau par sa droite, Alexis Collette parvient à s’extirper du piège volontaire et a encore une chance de jouer un rôle dans l’arrivée. Après 600m d’obstruction, Thierry Duvaldestin se range en dehors et Gamin Bazoquain finit bien pour prendre la 2ème place, malgré tout. Appelés chez les commissaires, les deux professionnels prennent quatre jours de mise à pied pour Alexis Collette et deux jours pour Thierry Duvaldestin. Une différence de traitement « incompréhensible » pour Alexis Collette qui reconnaît cela dit son erreur et nous a dit être allé s’excuser après la course. Damien Lecroq, entraîneur de Gamin Bazoquain, s’est lui aussi dit « surpris » par la différence de sanctions et « déçu d’un tel comportement de la part d’un membre du Conseil d’Administration de LeTROT qui a un devoir d’exemplarité. »
Les commissaires de Rambouillet ayant transmis le dossier aux commissaires de la société-mère, le sujet sera donc de nouveau étudié.

Une affaire qui ressemble à celle de Hyères
Ce cas nous rappelle forcément celui du mois de juillet dernier à Hyères quand pareil incident de course avait débouché sur un règlement de compte en direct entre Junior Guelpa et Christophe Martens, dans les rôles respectifs de gêné excédé par le comportement de son adversaire et de gêneur finalement empêché de défendre ses chances (il avait été mis hors course à mi-ligne droite). Résultat en direct de ce règlement de compte : huit jours pour le premier et quatre pour le second. Le dossier avait été transmis aux commissaires de la société-mère et on apprenait dix jours après l’incident que Junior Guelpa écopait de deux mois de suspension et Christophe Martens de quinze jours.

Recherche d'apaisement
Les deux hommes impliqués dans l’affaire de Hyères avaient des antécédents personnels ou par personnes interposées et cette séquence ressemblait à la conclusion de nombreux incidents comme l’avait expliqué ouvertement Junior Guelpa, lequel a toujours contesté sa sanction et la différence de traitement. Ce n’est pas le cas ici et les deux protagonistes appellent même dès ce lundi clairement à l’apaisement.



Course support de paris
Concernant le contexte "enjeux", la course de Hyères était labellisée PREMIUM et donc diffusée en direct sur Equidia. La course de Rambouillet était également support d’enjeux mais selon le mode CSI de l’ANJ (ex-Arjel), c’est-à-dire proposée aux différents opérateurs on-line. Elle était la R10 C5. Donc si les volumes d’enjeux ne sont pas comparables, des parieurs peuvent se considérer léser par un tel événement ainsi, bien sûr, que l’entourage du cheval empêché (il a pris la 2ème place tout de même comme Marcello Wibb à Hyères). Et allons au bout du raisonnement et rappelons que le cheval initialement gêné a lui aussi emporté dans sa perte d’allocations son entourage et ceux qui avaient joué sur ses chances.

les deux protagonistes appellent même dès ce lundi clairement à l’apaisement


LA QUESTION DE L’ARRÊT, OU NON, D’UNE COURSE À SAINT-AUBIN-LÈS-ELBEUF

Les chutes ont parsemé la réunion de Saint-Aubin-lès-Elbeuf dimanche. Et ce sont les deux épreuves d’apprentis et lads-jockeys qui ont concentré ces chutes. Mais avec deux scénarios bien différents.
Dans la première des deux (6e course du programme), une double chute en début de parcours a entraîné l’arrêt de la course, avec l’évacuation par les pompiers d’Audrey Lepère [lire par ailleurs]. La décision est évidemment logique – et était indispensable – et se trouve clairement exposée dans l’article 68 du code des courses (article intitulé : Arrêt du déroulement de la course en cas d’incident – lire cet article dans la colonne de droite) dans la liste des motifs d’arrêt d’une course : « la chute d’un jockey dans les 500 premiers mètres environ de la course et de la présence d’un cheval en liberté dans le peloton ». La course a été recourue dans la foulée avec deux chevaux non partants, ceux impliqués dans la chute.
Dans la deuxième épreuve (7e course du programme), la chute s’est déroulée en fin de parcours, dans le tournant final. Elle est partie d’un accrochage entre deux concurrents puis deux autres candidats ont été impliqués et ce sont donc quatre chevaux qui se sont retrouvés sans pilote alors que les premiers concurrents entraient dans la ligne d’arrivée. Le commentateur de l’hippodrome interroge alors à haute voix au micro : « Est-ce qu’on arrête la course ? Pas d’information ? » tout en complétant son commentaire de nombreux « Attention, cheval en liberté, cheval en liberté ! » Les commissaires n’interrompent pas l’épreuve. Devant, Grisbi d’Almo et Gamin Marandais s’expliquent pour la victoire. Durant ce laps de temps, un des candidats en liberté, au grand galop, coupe par l’intérieur de la piste et débouche au nez et à la barbe des deux premiers quelques mètres après le poteau d’arrivée. Les deux premiers sont en phase de reprise mais sont comme fauchés par celui qui leur coupe la trajectoire en venant de leur gauche. Les deux premiers se retrouvent à leur tour au tapis. Au total, ce sont donc six et non quatre chevaux qui sont donc tombés (les deux derniers tombés étant les deux premiers de l’épreuve fauchés après l’arrivée). Le vainqueur Grisbi d’Almo était drivé par Louis Larue et est entraîné par Philippe Autun. Ce dernier nous a donné des nouvelles du driver et du cheval. « Louis souffre d’une douleur à l’épaule. Il a encore subi des examens ce matin [lire lundi] et les médecins lui ont diagnostiqué une luxation de l’épaule nécessitant la pose d’une attèle. Ce sont deux mois d’arrêt avec l’éventualité d’une opération dans un mois si cela ne se remet pas comme il faut. » Au sujet de Grisbi d’Almo, il nous explique : « J’ai eu peur car j’ai vu mon cheval comme plaqué au sol par le cheval en liberté. Il a vu mon vétérinaire hier soir et rien n’a été détecté. Ce matin, il marche bien et est souple au paddock. »

Quelle décision prendre ?
Dans ce scénario, la décision d’arrêt de la course a dû se prendre dans le dernier tournant, sachant que les chutes ont eu lieu une bonne quinzaine de mètres derrière les animateurs et protagonistes à la victoire. Ne pas l’arrêter comme cela s’est passé, c’était penser (à tort ou à raison) que la chute ne pouvait pas impacter l’arrivée, ce qui s’est d’ailleurs réalisé. L’autre option, arrêter la course, se concevait d’abord sous un motif de sécurité et renvoie au corps général de l’article 68 du code des courses : « Si, après le départ valable, il se produit un accident dont les conséquences présenteraient un grave danger (…) les Commissaires des courses peuvent arrêter l’épreuve. »

Audrey Lepère commotionnée est sortie de l’hôpital
Emmenée à l’hôpital d’Elbeuf par les pompiers, Audrey Lepère est restée en observation tard dans la soirée pour sortir finalement de l’hôpital à une heure du matin. « Elle ne souvient pas de la chute mais va bien et nous a donné de ses nouvelles ce matin », nous a dit l’entourage de son employeur Adrien Pereira.

ARTICLE 68
Arrêt du déroulement de la course en cas d’incident
Si, après le départ valable, il se produit un accident dont les conséquences présenteraient un grave danger par suite :
- de la chute d’un jockey dans les 500 premiers mètres environ de la course et de la présence d’un cheval en liberté dans le peloton ;
- de la direction à l’envers du sens de la course prise par un concurrent ;
- de l’obstruction de la piste consécutivement à une chute ;
- d’une circonstance exceptionnelle empêchant le déroulement normal de l’épreuve ;
les Commissaires des courses peuvent arrêter l’épreuve.
Cette décision doit être immédiatement portée à la connaissance des intéressés au moyen d’un signal sonore spécial.
La course ainsi arrêtée ne peut être recourue que le même jour. En cas d’impossibilité de faire recourir le même jour, la course est annulée.


La phase finale : le cheval en liberté au second plan coupera ensuite la route des deux premiers.

© LeTROT
Pas de drame chez les chevaux
Président de la société des courses de Saint-Aubin-lès-Elbeuf, Louis Grenet nous a appris ce lundi : « On n’a pas dénombré sur place de blessures trop importantes pour ne pas être prises en charge immédiatement par notre vétérinaire. Ce dernier a recousu et soigné sur place. » Il reste évidemment que, chez les chevaux comme chez les humains, certains traumatismes peuvent se révéler plus tard.


LA QUESTION DE LA TOLERANCE DES ALLURES AU CENTRE DES DERNIERES HEURES

Dimanche à Carpentras, Emicoere Le Fol a été disqualifié après enquête pour ses allures. La sanction est jugée sévère par de nombreux observateurs, sur une piste en herbe qui exige évidemment de compenser pour les compétiteurs certains appuis douteux et instables. On est en fait ici dans l’application d’une doctrine prise à la lettre, sans intégrer les conditions particulières d’exercice, en l'espèce la piste de Carpentras ce dimanche. Soit, mais l'impression d'ultra-sévérité vis-à-vis des allures s'oppose forcément aux moyens qui sont mis à disposition pour les juger et l'uniformité dans les décisions.
Cette décision fait aussi écho, en opposition complète, aux arguments tout récemment portés par Charley Mottier après la disqualification de son représentant Guillermo jeudi dernier à Mauquenchy. Guillermo a lui aussi été disqualifié après enquête par les commissaires. Là encore, on a appliqué le code au sens strict en prenant la vue intérieure (la meilleure et la plus précise techniquement) pour décider de sa disqualification. Mais l’entraîneur a fait remarquer dans un courrier envoyé aux commissaires de la SECF que la doctrine récemment mise en jeu à Vincennes était plutôt celle des images les moins pénalisantes pour les chevaux. Charley Mottier, par ailleurs dans l’attente d’une sanction pour s’être emporté sans retenue contre les commissaires de Mauquenchy, plaide donc pour un jugement à décharge de son cheval, avec l’utilisation des images les plus avantageuses pour l’accusé. Et le professionnel demande dans ce cas le recours aux images de trois-quarts qui favorisent les allures de son cheval. Voilà en quelque sorte la demande d’extension, dans le jugement des allures, du principe du doute qui, en justice, doit toujours être à l’avantage de l’accusé.

Le cas particulier de Vincennes
L’argument avancé par Charley Mottier sur la recherche des images les plus avantageuses pour l’accusé lors d’une séquence d’enquête est en fait uniquement circonscrite à Vincennes. C’est en effet le seul hippodrome qui propose deux vues perpendiculaires à la piste (caméra intérieure de la voiture des juges aux allures et caméra extérieure dite caméra câble). Si l’arbitrage des images se fait à l’avantage d’un cheval, c’est bien avec l’appui d’un de ces deux plans. Car, s’il n’a pas de doctrine chez Le TROT qui fasse rechercher les images les plus avantageuses pour un cheval, il y a bien une obligation de communication et d’explication d’une décision avec des images claires et éclairantes. Et, à Vincennes, si le plan extérieur indiscutable efface des soucis d’allures renvoyés par le plan intérieurs, c’est celui-là qui sera retenu. Et vice-versa. La méthode de travail est bien de prendre la meilleure des deux vues mais pas plus. Et le principe est bien toujours de dire qu’on ne peut pas vraiment juger avec des images de trois-quarts ou tout angle déformant la lisibilité du mouvement. Selon une formule souvent entendue chez LeTROT, « le juge de paix pour juger, c’est la vue intérieure de la voiture ».

Une uniformisation impossible
Il reste que la théorie de Vincennes ne peut être appliquée partout. La spécificité des moyens parisiens et de la configuration du site sont un obstacle à l’uniformisation de la méthode. Même Enghien ne peut revendiquer de telles conditions parfaites d’analyse des allures. Et que dire ensuite des hippodromes de province ou le recours aux images fortement anglées sont obligatoires faute de choix quand une seule caméra, fixe, balaie le site ? Cela veut donc aussi bien dire que le jugement sur les allures est encore et toujours bien une question de perception personnelle, et donc de subjectivité. Les débats devraient donc continuer sur certaines décisions, celles qui ne sont pas partagées par tous et toutes. Voilà sans doute la loi du trot.

Le projet de la Commission d’appel
Pour rappel, si un professionnel juge une disqualification sévère, il peut demander à la société mère de s’exprimer sur le cas litigieux. C’est bien la démarche entreprise ces derniers jours par Charley Mottier à propos de Guillermo. Le tout doit aussi se voir dans le contexte d’un projet d’étude de création d’une commission d’appel. Des éléments du projet devraient d’ailleurs être diffusés d’ici septembre.

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