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Actualité - 14.04.2021

Figure du Centre-Est, Serge Peltier sur tous les fronts

Il n’a pas gagné ce mercredi lors de la réunion du GNT de Lyon-La Soie. Pourtant le nom Peltier a bien brillé grâce à son fils Ludovic, entraîneur de l’impressionnant Indro Park. Serge Peltier est l’une des plus grandes figures de la région du Centre-Est du trot. Le sexagénaire est toujours aussi efficace sur un sulky et est devenu depuis la fin d’année 2019 un élu socioprofessionnel en première ligne dans sa région et au niveau national. Rencontre.

Il n’a pas encore levé le pied mais prévient qu’il ne repartira pas en 2024 dans de nouveaux mandats d’élu régional et national. Serge Peltier est président du Comité Régional du Trot du Centre-Est, membre du Comité de LeTROT et président de la Commission du Code de la société mère. Côté courses, le professionnel de 66 ans est également toujours très actif. Il a remporté 45 courses l’an dernier et en est déjà à 19 cette année. Le passage du Grand National du Trot ce mercredi à Lyon-La Soie est l’occasion de faire un tour avec lui de toutes ses actualités : professionnelle, électorale et familiale.

24H au Trot.- Qu’est-ce qui fait encore marcher Serge Peltier dans les courses ? Comment pouvez-vous être encore autant présent sur les programmes ?
Serge Peltier.- J’ai beaucoup moins de chevaux à entraîner et je suis donc beaucoup plus disponible comme driver. Et comme je suis assez demandé par deux ou trois entraîneurs de la région, j’essaie de travailler pour eux sans changer de région. Je dirais qu’aujourd’hui, je ne cours plus que dans le Centre-Est.

Repères biographiques
■ Né le 28/05/1954 (66 ans)
■ Nombre de victoire en tant que driver et jockey : 1 877 (depuis 1980)
■ Nombre de victoires au monté : 47 (depuis 1980)
■ 1re victoire : Urbain de Sassy à Caen au monté
■ Meilleurs chevaux entraînés : Quidam Castelets (181 643 €), Gébrazac (905 223 € – Prix René Ballière, Gr1), Castel Valadour (339 656 €), Jow du Vro (494 904 €), Une Sérénade (762 643 €)
■ 3 enfants : deux fils entraîneurs (Ludovic et Franck) et une fille Valérie, mariée à Pascal Monthulé


Votre effectif d’entraînement est de quel ordre aujourd’hui ?
L’année dernière, je suis même descendu à trois chevaux. J’ai regonflé peu mon effectif et j’en suis à sept aujourd’hui mais je n’irai pas au-delà. Il y a un âge pour tout. J’ai beaucoup donné à l’entraînement quand j’ai eu cent chevaux dans les années 2000 à l’époque de Gébrazac notamment. Il y a un temps pour tout.

Vous êtes au service de nombreux entraîneurs et notamment de jeunes professionnels. Quel est votre type de relation avec eux ? Recherchent-ils un partage de votre expérience ?
J’ai envie de vous dire que les « vieux » entraîneurs ne font plus appel à moi et prennent de jeunes pilotes. Ce sont les jeunes entraîneurs qui prennent l’ancien du peloton. J’ai toujours drivé comme un entraîneur. Cela n’a pas vraiment changé avec le temps ou ce qu’on pourrait appeler la sagesse. J’ai gagné beaucoup de courses comme cela mais aussi j’en ai perdu beaucoup en ne courant pas de façon offensive. C’est ma façon de faire. Pour moi, la carrière de cheval ne se réduit pas et ne s’arrête pas à une course. C’est ma vision et je crois que cela plaît à certains entraîneurs de la région comme Guillaume Huguet et Rémi Mourlon qui me font souvent appel. Je partage avec eux mes impressions.

Vous êtes également très investi dans l’élevage avec le label « Best ». Où en êtes-vous ?
J’ai quatorze poulinières dont quatre en association avec Madame de Bourbon-Busset. Ma position est d’être vendeur. Je garde une pouliche de temps à autre quand elle ne coche pas toutes les cases de la vente, comme un modèle insuffisant. Ma ligne est bien de vendre intégralement. Il m’arrive parfois de récupérer des poulains ou pouliches renvoyé(e)s après les ventes, souvent pour de petits détails. Cela a été le cas de For Ever The Best (Village Mystic) ou, l’an dernier, d’une 2 ans de Charly du Noyer qui va très, très bien.



Et que dire de la « dynastie » Peltier ?
J’éprouve une grande fierté. Chacun de mes trois enfants a tracé son chemin avec réussite dans les courses. Je suis très heureux de voir la réussite de Ludo [Ludovic] et ses deux cracks actuels car il a vraiment deux « I » qui sont super [Invincible Cash et Indro Park, ce dernier a gagné avec brio ce mercredi à La Soie]. Quand on voit aussi la réussite de Pascal et Valérie [Pascal Monthulé, marié à Valérie, la fille de Serge Peltier] avec une quinzaine de chevaux seulement, c’est fabuleux. Quant à Franck qui est installé sur notre site familial, il monte en puissance aussi avec des petites valeurs. Il a réussi à entrer des poulains plus intéressants cette année. Il va y arriver, il n’a pas peur du travail. Pour moi, quand ont voit cela, on a envie de se retirer tranquillement.

Ludovic s’est clairement positionné dans une logique parisienne avec une dynamique d’investissement. Votre décryptage ?
Il a su trouver des clients du côté de Lyon, dont la famille Griezmann et d’autres qui ont suivi. Tous ont mis de l’argent pour acheter des chevaux. S’ils n’ont pas gagné d’emblée dans la génération des « H », ils ont été bien servis chez les « I ». Il faut maintenant que cela continue.


J’ai toujours drivé comme un entraîneur. Cela n’a pas vraiment changé avec le temps.
Serge Peltier

Le bien-être équin : « J’ai peur qu’on aille trop loin »
Thème devenu omniprésent en l’espace de quelques mois dans l’univers équin, et hippique en particulier, le bien-être animal est un sujet préoccupant pour Serge Peltier : « Pour moi, ce peut être une bouteille de gaz qu’on ouvre et qui va exploser. Ou même pire encore. J’ai peur qu’on aille trop loin. On a fait beaucoup d’efforts, notamment aux niveaux de la cravache, des piquants et d’autres équipements encore. Mais maintenant, il ne faudrait pas aller plus loin car on risque de franchir une ligne rouge. Si on commence à parler de protéger ou sécuriser, cela veut dire que très vite, un jour, on va nous interdire de déferrer, d’utiliser une cravache. Il y a beaucoup de choses et conséquences qu’on ne mesure pas. C’était bien d’y penser et d’agir mais, là, on va trop loin, au risque de remettre en cause l’existence même des courses et de nos métiers. »

Vos enfants vous demandent-ils conseil ?
Bien sûr, on parle, on échange. L’autre jour, j’étais chez Ludo et il a proposé à l’un de ses clients de me demander mon avis à propos d’une dent de cochon qu’avait son cheval. Je leur ai dit qu’il fallait l’enlever d’autant plus que le cheval ne courait pas en ce moment. C’est une dent qui autrement va le gêner toute sa vie. Cela s’opère, il n’y a aucun problème. J’ai trouvé ce geste sympa et comme un petit motif de fierté.

Parlons maintenant de vos responsabilités d’élu. Vous être président du Comité régional du Trot, membre du Comité de LeTROT et président de la Commission du Code. Quelle impression après plus d’un an de travaux ?
D’abord je me suis investi, avec d’autres dans notre région du Centre-Est, pour la candidature de Jean-Pierre Barjon et on ne le regrette pas. Ce qui n’était pas prévu au départ, c’est que je prenne la présidence de la Commission du Code. Mon constat : cela fait beaucoup de travail, c’est très intéressant et très compliqué. Il y a un très grand nombre de réunions mais je suis heureux de ce que l’on a fait en un an. C’est vrai qu’il faut beaucoup discuter et quelquefois s’imposer un peu. Et on y arrive je trouve. Je ne ferai qu’un seul mandat de quatre ans. À la fin d’année 2023, j’aurai 69 ans… Après je vais laisser ma place, tant aux plans national que régional ; il y a des jeunes qui viennent derrière.

Peut-on parler de changement d’époque au trot ?
Je constate qu’il y a eu beaucoup de changements lors des derniers mois. Monsieur Barjon a fait de belles choses, notamment dans le registre de la solidarité. Comme la décision de reverser l’excédent 2020 sur des critères particuliers, aux propriétaires des chevaux n’ayant pas gagné 12 000 €, c’est très bien. C’est mieux qu’au galop où ils ont réparti l’excédent à tout le monde, même à l’entourage du gagnant du Jockey Club. C’est un exemple. Au trot, on a donné aux gens qui n’avaient pas ou peu gagné. Je suis fier de faire partie de cette équipe-là.

Quelle revendication régionale avez-vous porté au plan national et qui a été validée ?
On a obtenu la priorité régionale à 7 jours. Cela a été demandé par plusieurs régions et plusieurs présidents comme Guy Verva et Jean-Philippe Mary. Dans une région comme chez nous où il n’y a pas beaucoup de courses, c’est important d’éliminer en priorité les chevaux qui viennent d’autres régions dès lors qu’ils ont couru dans les sept jours précédents. Il y avait trop de visiteurs qui venaient, qui couraient trois fois dans la semaine et qui faisaient que certains chevaux régionaux devaient rester à la maison.

Comment parleriez-vous du rôle du Comité régional ?
C’est d’une part une structure consultative pour les décisions nationales et d’autre part c’est là que se passent les décisions vraiment régionales. On s’occupe de la région quoi et, parmi les prérogatives, il y a les courses à priorité régionale. On a un quota, je crois 17 ou 18 courses par an qui sont uniquement ouvertes aux chevaux entraînés dans la région du Centre-Est. On essaie de les placer à bon escient sur le calendrier, en début ou en fin de saison. En milieu de saison, c’est moins utile, il y a des courses partout.

Que pourriez-vous dire du programme de votre région ? Donnez-nous le pouls du Centre-Est...
Je trouve qu’on n’est pas favorisés. On a beaucoup de réunions Premium en semaine tant et si bien qu’on a beaucoup de visiteurs. Il suffit de regarder les partants du jour à Lyon. Il doit y avoir 60 % de visiteurs. Ce n’est quand même pas rien. Avant le programme était différent. On courait les dimanches « tranquillement » entre nous. C’était une autre époque. La conséquence est que le niveau a augmenté dans toutes les catégories. Je vais vous donner l’exemple du bon cheval de Jean-Philippe Ducher, Invincible Mauzun, que je drive dans la région. Il n’a toujours pas gagné alors qu’il « marche » 1’13 la dernière fois. A chaque fois, il a été battu par un visiteur.


Je suis fier de faire partie de cette équipe.
Serge Peltier

© ScoopDyga

Est-ce à dire que vous recommanderiez une autre région à un jeune pour s’installer ?
Je lui dirais d’abord de prendre une location, de ne pas acheter avant de s’assurer qu’il réussit. Et je lui dirais d’aller plus dans le sud, Sud-Est ou Sud-Ouest où on court plus souvent et où on a moins de mal à courir les chevaux. J’aime ma région et je la défends mais, au trot, on n’est pas devenus la meilleure des régions.

Votre perception d’élu dans la période de crise sanitaire que nous traversons ?
D’abord, il faut rappeler que nous faisons partie des privilégiés, de ceux qui ont pu continuer à travailler. Ce n’est pas le cas pour d’autres en France et dans le monde. On a toujours nos allocations grâce à des enjeux qui tiennent. C’est évidemment primordial. Quand le foot va revenir avec le public dans les stades, cela va être plus compliqué de tenir le rythme. Il reste que cela tient la route en ce moment. Les enjeux internet fonctionnent bien, c’est top. Personne ne s’en souciait vraiment avant. Maintenant, c’est devenu une priorité et cela fonctionne.

Avec votre position, vos différentes casquettes et votre expérience, est-ce que les courses ont manqué quelque chose dans leur histoire récente ? Si oui, quoi ?
Dans le domaine particulier de l’élevage, le trot prend du retard sur le sujet du transport de semence. On est toujours réticent à ce procédé et je trouve cela un peu dommage. Cela impacte directement les éleveurs des régions qui sont éloignées des haras où sont stationnés les principaux étalons. On n’avance pas sur le sujet. Je pense évidemment à un transport réglementé qui ne soit pas couplé au déplafonnement du nombre de saillies. Il faut rester dans le cadre d’un nombre de cent saillies au maximum. Si on reste dans ce cadre de 100 juments par an par étalon en cumulant toutes les modalités d’insémination possibles (monte naturelle, insémination en sperme frais, transport de semence), je ne vois pas où sont les risques pour l’élevage. Sur le plan du programme de courses, je trouve qu’il est très bien fait aujourd’hui et l’était déjà hier.

Comment recevez-vous ce qu’on peut appeler le marketing des courses ? On vient par exemple de découvrir de nouvelles marques pour la filière classique durant l’été.
J’adhère à tout cela. Ce que l’équipe du Trot a fait pour le Prix d’Amérique par exemple, j’étais pour. Cela a été une réussite même si c’est un concurrent du PMU [NDLR : ZEturf] a eu le privilège d’être sponsor de la marque Prix d’Amérique Races. Je pense qu’il faut savoir mettre en avant l’ensemble des belles courses du programme français. C’est un travail qui aurait pu être fait avant d’ailleurs.

Un sujet sur lequel vous aimeriez vous exprimer ?
La question du nombre de partants. On a beau faire et refaire nos programmes, on constate une baisse régulière du nombre de partants. Je pense qu’on a effectué une telle sélection qu’il va peut-être y avoir bientôt moins de chevaux à entraîner. On est arrivé au bout d’un système où la sélection est devenue omniprésente. Même les « petits » entraîneurs de province sélectionnent très dur, chose qu’ils ne faisaient pas avant. Ce système fait aussi qu’un certain nombre de bons chevaux passent au travers parce qu’on ne leur laisse pas le temps de se dévoiler ou de s'épanouir. Mais je reviens à la base : la première conséquence de notre sélection est la diminution du nombre de partants. Il va falloir qu’il y ait une réflexion sur le sujet car, du nombre de partants, dépendent énormément les enjeux.
© ScoopDyga
Avec Gébrazac après la victoire dans le Prix de Belgique 2003 - © ScoopDyga

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