Richard Denécherre, la mémoire du Sud-Ouest

C'est l'une des personnalités incontournables du Sud-Ouest. L’octogénaire Richard-William Denécherre est désormais moins présent dans les pelotons mais se produit encore et gagne toujours. Il s’est ainsi imposé avec son élève et pensionnaire L'Écrin d'Or sur l'hippodrome de Beaumont de Lomagne il y a une dizaine de jours. Celui qui compte six titres de Sulky d’Or, dont le dernier en 1993, a souvent été au départ du Grand Prix du Sud-Ouest (Gr.2). Il y compte de nombreuses places sans pour autant être parvenu à s'y imposer. Il revient pour 24h au Trot sur ses meilleurs souvenirs en lien avec l'épreuve mythique de sa région, créée en 1978, et dont l'édition 2024 se dispute ce mercredi à Agen.

La mémoire est aiguisée. Quand on aborde le Grand Prix du Sud-Ouest avec Richard Denécherre, les noms s’enchaînent sans hésiter. L’épreuve qui proposera sa 47ème édition ce mercredi à Agen "a sacré les meilleurs chevaux en activité depuis sa création à la fin des années 70. Elle se disputait initialement au printemps et, dès sa première édition, nous avons eu de nombreux champions à se présenter. Les entraîneurs parisiens (et normands) n'ont jamais hésité à faire un long déplacement dans notre région pour participer à cette grande course. Eleazar (Kerjacques) a été le premier lauréat en 1978 avant de remporter le Prix d'Amérique en 1980".
Richard Denécherre connaît son Grand Prix du Sud-Ouest illustré comme sa poche et énumère les noms d’Idéal du Gazeau (Alexis III), de Lurabo (Ura), de Lutin d'Isigny (Firstly), d’Ourasi (Greyhound), de Sea Cove (Bonefish) ou encore de Général du Pommeau (Sébrazac). Tous ont également inscrit leur nom aux palmarès du Grand Prix du Sud-Ouest et du Prix d’Amérique. Une liste que l’on se doit aussi de compléter des noms du précité Eléazar et d’Abo Volo (Lurabo) et d’Idao de Tillard (Sévérino) pour être exhaustif.

24h au Trot.- D’abord, pourriez-vous évoquer quelques souvenirs personnels de la grande épreuve du Sud-Ouest ?
Richard Denécherre.- Ce qui est marquant à mes yeux est que, dès le lancement de cette course, le public a répondu présent. Le summum a sans doute été atteint en 1987 à Beaumont-de-Lomagne avec la venue d'Ourasi. Je me rappelle que l’hippodrome était bondé et que certains spectateurs avaient garé leur voiture à quatre kilomètres de l'hippodrome pour voir le gagnant du Prix d'Amérique. L'ambiance était folle. À cette époque, le public se déplaçait pour approcher les champions qu'il ne voyait qu'à la télévision pendant quelques minutes lors de leurs exploits à Vincennes. Ourasi et Jean-René Gougeon s'étaient littéralement baladés. Parmi mes souvenirs, il y a aussi l’édition de 1995 dans laquelle Abo Volo avait réalisé une magnifique course pour s'imposer en compagnie de Jos Verbeeck à Bordeaux. Sa prestation m'avait enthousiasmé. La victoire d'Abricot du Laudot et Jacques-Henri Treich en 1997 à Agen est aussi un grand moment. Il s’agissait, enfin, d’une victoire d’un cheval et d’un homme de la région.

Vous ne figurez pas au palmarès. Un regret ?
R.D.- Sans doute. J’y ai néanmoins obtenu de bons classements comme en 1985 à Agen quand Ulf Nordin m'avait confié Solo Hagen (Garry Haleryd). Nous avions pris l'accessit d'honneur derrière Lutin d'Isigny (Firstly) et Jean-Paul André, l'année de leur sacre dans le Prix d'Amérique. En 1986, j’avais Nodesso (Quioco) qui n'avait pas démérité en prenant la 3ème place derrière son compagnon d'écurie Ogorek (Borgia III) associé à Michel Roussel.

Et vous avez aussi eu des pensionnaires au départ. Qui pourriez-vous citer ?
R.D.- En 1993, j'ai eu la grande joie de participer avec ma jument Toque d'Or (Chambon P) que j'avais en association avec mon ami Charles Fournier. C'était une très bonne jument, juste en dessous des meilleurs. Elle avait donné son maximum pour accrocher la 5ème place d’une édition remportée par Sea Cove (Bonefish) et Jos Verbeeck. Les mêmes allaient remporter quelques mois plus tard le Prix d'Amérique. Et puis il y a eu toute l’histoire avec ma championne Fan Idole (Le Ham).

À son sujet justement, pourquoi une telle jument ne figure pas au palmarès ?
R.D.- Elle a participé à cinq Grand Prix du Sud-Ouest et pour elle le problème était la corde. Si cette épreuve s'était déroulée sur une piste à main gauche, elle aurait sûrement inscrit son nom au palmarès. Elle était moins à l'aise à droite et nous perdions souvent du temps dans les courbes. Malgré tout, elle a toujours répondu présent. En 1999 à Agen, Général du Pommeau et Jules Lepennetier s'imposaient quelques mois avant leur victoire dans l'Amérique. Ma jument terminait 4ème. L'année suivante à Toulouse, elle prenait la 3ème place derrière Remington Crown (Lord Of All) et Jorma Kontio. En 2001 et 2002, c'est le pensionnaire d'Ulf Nordin, Jackhammer (Demilo Hanover) qui s'imposait. Ma jument prenait respectivement les 3ème et 4ème places. Sa meilleure prestation a été signée lors de sa dernière saison de course. En 2003 sur l'hippodrome de Toulouse, nous avons pris la 2ème place derrière Gigant Neo (Super Arnie) et Jean-Michel Bazire.

Quel regard portez-vous aujourd’hui sur l’épreuve ?
R.D.- Elle reste incontournable pour notre région mais je trouve qu'elle a perdu de sa superbe depuis une vingtaine d'années. Avec la multiplication des courses et l'influence de la télé, j'ai l'impression que le public délaisse ce grand rendez-vous et c'est regrettable.

■ Lors de la première édition, en 1978, le départ a été donné avec l’autostart de la société de Cagnes-sur-Mer. La raison ? Le véhicule initialement désigné était celui de Vincennes mais il a connu un accident lors de son déplacement dans le Sud-Ouest. Au dernier moment, et en catastrophe, il a donc fallu rapatrier l’autostart cagnois.
■ Paré du label Groupe 1 à l’émergence de la terminologie "Groupe" au trot dans les années 1990, précisément de 1992 à 1998 (soit sept occurrences), le Grand Prix du Sud-Ouest est devenu Groupe 2 lors de sa 22ème édition, en 1999 (remportée par Général du Pommeau). Cette modification inclut une évolution importante du statut avec l’autorisation donnée, à partir de cette date, aux hongres de participer.
On sait que le déroulement de course est un facteur déterminant dans la capacité de Hooker Berry (Booster Winner) à produire sa meilleure valeur. Lorsqu'il est ménagé dans la première partie d'épreuve, le vainqueur du Prix d'Amérique Legend Race 2023 peut terminer très vite. Il vient encore d'en faire la démonstration dans l'UET Elite Circuit Finale (Gr.1) pour décrocher la 3ème place, affichant le meilleur chrono du dernier kilomètre le 11 octobre en 1'09''4 (un temps qu'il partage avec le vainqueur Go On Boy). Visiblement revenu au mieux actuellement, le partenaire de Nicolas Bazire a un premier rôle à jouer dans la 47ème édition du Grand Prix du Sud-Ouest (Gr.2). Gagnant d'une de ses quatre sorties à main droite, à Vichy, il aura pour l'empêcher d'accéder à ses fins deux 5 ans ambitieux.

Le jour "J" ?
Titulaire de Groupe 1 (la Sulky World Cup 4 Ans Finale) en janvier 2023, Just For You (Love You) vient de montrer que ses dispositions classiques étaient intactes en concluant 3ème du Critérium des 5 Ans (Gr.1). Elle conduira la délégation des "J" avec Just A Gigolo (Boccador de Simm) qui devrait apprécier le contexte du jour, une piste plate corde à droite sur laquelle il évoluera déferré des quatre pieds.

Le retour d'Etonnant en attraction
Le retour du champion Etonnant (Timoko) sera l'un des centres d'intérêt de l'épreuve. Absent des programmes depuis décembre dernier, il a connu des problèmes de santé que son entraîneur Richard Westerink pense résolus, nous déclarant au début du mois : "Ce que je sais, c'est que l'ensemble de ses derniers travaux est bon. Et Etonnant ne m'a jamais menti au travail ! C'est l'une des dernières fois que je pourrai lui être associé en course alors je vais me faire plaisir et nous aurons de sérieuses ambitions." Avec ses contemporains de 10 ans Emeraude de Bais (Repeat Love) et Elvis du Vallon (Rêve de Beylev), Etonnant pourrait bien en remontrer aux plus jeunes sur une piste sur laquelle il s'est déjà imposé en 2017.

Palmarès sélectif du GP du Sud-Ouest

■ 9 vainqueurs du Prix d'Amérique
Eléazar (2 titres dans le GP du Sud-Ouest), Idéal du Gazeau (3), Lurabo, Lutin d'Isigny, Ourasi, Sea Cove, Abo Volo, Général du Pommeau et Idao de Tillard
■ 6 vainqueurs de l'Elitloppet
Eléazar (2), Idéal du Gazeau (3), Ianthin, Sea Cove, Remingtown Crown et Timoko
■ 8 hongres de top niveau
Général du Lupin, Nimrod Boréalis, Roi du Lupin, Swedishman, Aubrion du Gers, Cleangame, Bugsy Malone et Gaspar de Brion