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Actualité - 06.07.2023

Les Wind ont le vent en poupe

La casaque bleue et blanche constellée d’étoiles de l’Ecurie du Haras des Quatre Vents fait feu de tout bois. Elle s’est imposée coup sur coup à Vincennes, le 30 juin, avec Guerrière Wind et à Enghien, le lendemain, grâce à Elixir Wind. Le fondateur et grand timonier de l’Ecurie s’appelle François Van de Woestyne. Rencontre avec un passionné

Le souffle d’une vie professionnelle intense, François Van de Woestyne connaît. Il l’a connu dans l’industrie agro-alimentaire. L’intensité demeure encore aujourd’hui chez le jeune retraité de 65 ans, sous une autre forme. Elle se déploie dans les courses depuis que l’homme a posé ses valises en Normandie, non loin de son Haras des Quatre Vents, basé à Saint-Maclou dans le département de l'Eure. L’amour du cheval l’a gagné. Et cela ne devrait pas s’éteindre de sitôt à l’écouter : "Je viens de prendre ma retraite et j’ai désormais posé mes valises en Normandie. J’ai besoin d’aller voir mes chevaux même si c’est juste pour une distribution de carottes. Je vais pouvoir m’adonner totalement à ma passion avec mes dix chevaux retraités à la maison dont Mille Fleurs, ma première jument. Je dois avoir une trentaine de chevaux retraités avec ceux qui sont au haras."

Les débuts ? Un coup de foudre nommé Kesaco
On parle souvent d’événement fondateur dans la naissance d’une passion. François Van de Woestyne se souvient parfaitement du déclic initial et nous le partage. Il nous fait remonter pour cela en 2004 : "J’ai été amené à m’occuper, un peu par accident, des chevaux de balade de ma fille vers l’âge de 45 ans. Cela m’a donné une première proximité avec les chevaux. Puis est arrivé le Prix d’Amérique 2004 que j’ai suivi devant ma télé. Il s’agissait de la victoire de Késaco Phédo. Durant toute la course, j’ai eu des frissons. À l’arrivé, je ne pensais qu’à une chose : ‘J’aurai un trotteur !’ À la fin de l’année, je suis allé aux ventes et j’en ai acheté trois. Tout a commencé comme cela. J’ai eu l’occasion de faire beaucoup de voile, de transat, etc. et le départ du Prix d’Amérique m’a fait penser aux départs des transats avec l’alignement des concurrents, le fait d’arriver lancé sur la ligne, les cris… Je me suis alors dit qu’il était temps de mettre la voile de côté et de me lancer dans une nouvelle aventure mais toujours avec l’esprit de compétition."


Le début de l’histoire
Comment un inconnu peut-il acheter seul trois trotteurs en vente publique à Deauville ? En fait, François Van de Woestyne avait préparé cette première intervention avec la méticulosité d’un homme rompu à la compétition. Il nous précise sur ce sujet : "J’étais en relation avec Marie-Jeanne Cayron [N.D.L.R. : femme d’Albert Cayron, le propriétaire du Haras de l’Orne à l’époque] dans mon environnement professionnel. Nous nous sommes retrouvés un soir à Vincennes et, par ce biais, j’ai commencé à avoir des connexions dans le trot. Je me suis alors plongé dans toutes les revues traitant de l’élevage et des croisements que j’ai trouvées. J’ai passé des nuits blanches à me documenter avant de faire mes premiers investissements. Dans l’hiver, je suis allé aux ventes de Deauville pour acheter un cheval et je suis rentré avec trois chevaux en me disant que cela était suffisant et que je m’arrêterai là. C’était fin 2004 et, en 2023, notre haras compte presque 100 chevaux."

Des succès rapides et un effectif en croissance
Les succès ne tardent pas. Quelques mois après les premières acquisitions, François Van de Woestyne, alors en nom propre, gagne à Vincennes avec Mille Fleurs (Elio Josselyn). Il se souvient de la rapide expansion de son écurie : "Mille Fleurs m’a offert une première victoire à Vincennes et Nacre Blanche (Gai Brillant) un premier succès à Enghien durant l’été 2005. Après leur carrière, elles sont entrées à l’élevage et c’est à ce moment que l’écurie a pris une nouvelle envergure. Je n’étais pas dans l’optique de créer un élevage mais il n’était pas question de me séparer d’elles. J’avais mis le doigt dans l’engrenage et cela s’est transformé en passion."
La tentation de l’élevage a été le plus fort avec aussi la volonté de se projeter sur un temps long. Le propriétaire continue encore : "Rapidement, l’élevage est vraiment devenu quelque chose de très important pour moi. Je pense que, si l’on veut durer dans une activité comme le trot, il faut pouvoir s’appuyer sur quelque chose de solide. Avec mes proches, nous avons construit un projet autour de cet élevage de taille raisonnable tout en continuant à investir dans quelques chevaux à courir. Aujourd’hui, je me sens autant éleveur que propriétaire. Nous avons beaucoup investi dans cette partie ces dernières années pour essayer de monter un élevage de qualité."

Une histoire de famille
"Ma fille Marion est gérante du haras depuis de nombreuses années et nous partageons cette passion tous les deux. Elle fait partie intégrante de l’écurie. Il est vrai que le fait d’être accompagné dans cette aventure avec ses proches est encore plus motivant même si ma femme et notre fils suivent cela avec plus de détachement."








Xavier Réveillon, l’homme de confiance
"Il était mon premier salarié il y a 18 ans lors de la création de mon écurie. La collaboration avait alors été courte car un poste au sein de l’écurie de Joël Hallais s’était offert à lui et il l’a logiquement accepté. Nous sommes toujours restés en contact. Lorsque Philippe Forget est parti, Xavier Réveillon est revenu travailler pour nous. Il gère le débourrage, l’entraînement jusqu’aux qualifications et la remise en route des chevaux de courses. Il est un passionné par son travail et tout se passe bien."


Les Wind, un vent venu d’ouest
Pourquoi les Wind ? Le label d’élevage du Haras des Quatre Vents fait référence au nom de son créateur qui nous explique : "Si l’on prononce le début de mon nom, cela fait vent d’Ouest (Van de Woestyne). J’avais une société qui s’appelait ainsi par le passé. Au début de mon élevage, j’avais donné le suffixe « Ouest » sans me rendre compte qu’il était déjà pris d’où la transformation en « Wind »."



être accompagné dans cette aventure avec ses proches est encore plus motivant
François Van de Woestyne

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Changement de stratégie depuis quatre ans
Conçue dans un esprit d’écurie intégrée, allant de l’élevage à l’exploitation en courses de ses propres produits, l’Ecurie du Haras des Quatre Vents a changé de modèle en 2019. Une conséquence du départ de l’homme alors en charge de l’entraînement. François Van de Woestyne explique : "Philippe Forget a travaillé très longtemps au sein de notre écurie où nous réalisions tout de A à Z. En 2019, il a souhaité mettre fin à notre collaboration. Cela a été un élément déclencheur dans notre stratégie. Nous avons gardé l’élevage, le débourrage, ainsi que le pré-entraînement jusqu’aux qualifications, mais il était temps de dispatcher nos chevaux à courir chez différents entraîneurs. Nous nous concertons avec Xavier Réveillon, notre homme de confiance, sur les différentes options pour les chevaux. En fonction de leur profil, nous essayons de les envoyer chez l’entraîneur qui nous semble le mieux adapté. Le nombre de succès a fortement augmenté depuis que nous avons opté pour cette organisation. C’est avec plaisir qu’ils reviennent à la maison lors des vacances ou de leurs périodes de convalescence."

Un pool d’entraîneurs soigneusement sélectionnés
La collaboration avec une petite dizaine d’entraîneurs exige un important travail de suivi. Pour chacun, il existe une histoire. En voici quelques-unes que l’animateur de l’Ecurie du Haras des Quatre Vents nous partage : "J’avais déjà des affinités avec certaines personnes comme Franck Nivard qui avait régulièrement été associé à nos chevaux. Je lui ai rapidement proposé Furious Wind (Kepler) et Guerrière Wind (Bird Parker). Cette dernière, que nous pensions très moyenne, vient de s’imposer à Vincennes ! Thierry Duvaldestin avait aussi été associé à ma casaque par le passé et je souhaitais travailler avec lui. Charley Mottier s’était imposé comme jockey avec Elixir Wind (Nahar de Béval) au monté en 2018 alors qu’il était au tout début de son installation. C’est avec plaisir qu’il l’a pris à l’entraînement. Jean-Philippe Monclin a également de la réussite avec nos élèves comme avec l’invaincue, en trois sorties, Kassandra Wind (Sam Bourbon), pour ne citer qu’elle."



Une réussite constante
Le bilan chiffré de l’Ecurie du Haras des Quatre Vents est d’une remarquable constance, saison après saison. La réussite de ses représentants sur le podium dépasse désormais la barre des 40 %. François Van de Woestyne nous livre son analyse : "Cela fait trois ou quatre ans que nous avons une réussite constante. Avec 26 victoires sur le premier semestre (corrigée à 28 au 2 juillet), nous sommes un peu en avance sur les dernières années. Malheureusement, nous n’avons pas le grand crack, mais nous avons un vivier de chevaux de bonnes catégories. Jack Tonic (Charly du Noyer), Hello Sport (Albéric) et Elixir Wind (Nahar de Béval) permettent à l’écurie d’avoir un bon ratio et d’afficher un pourcentage de réussite très intéressant."

La réussite (sur le podium) depuis 2019
■ 2019 - 36,2% / 36 vict. en 185 partants (18 chevaux)
■ 2020 - 38,7% / 31 vict. en 168 partants (21 chevaux)
■ 2021 - 34,3% / 38 vict. en 213 partants (29 chevaux)
■ 2022 - 41,4%/ 42 vict. en 222 partants (32 chevaux)
■ 1er semestre 2023 - 44,2% / 26 vict. en 95 partants (24 chevaux

Mon rêve est d’élever un ou une gagnant(e) de Groupe 1
François Van de Woestyne

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Elixir Wind (ici au centre) lors de sa victoire samedi dernier à Enghien
DU CÔTÉ DE L’ELEVAGE : NE PAS METTRE TOUS SES ŒUFS DANS UNE SEULE SOUCHE

La passion de l’élevage est comme chevillée aux propos de François Van de Woestyne. L’éleveur cible des descendantes de grandes souches dans ses recrutements, avec la volonté de diversifier ses origines : "D’abord, je suis devenu un vrai passionné d’élevage. Dans ma logique, je ne voulais pas m’appuyer sur une seule souche et j’ai essayé d’élargir le spectre de mes achats à partir de cinq ou six très bonnes souches. Au fil du temps, nous allons resserrer avec les différents résultats. Je me suis rapidement fait une liste avec celles qui m’attiraient. Depuis quatre ou cinq ans, j’ai pu investir dans plusieurs grandes lignées comme celle de Dimitria (Mario), à l’origine de la grande famille des Bourbon. J’ai aussi la sœur de Love You (Coktail Jet). Avec Thierry Duvaldestin, nous avons investi dans Icône d’Atout (Prodigious), la sœur d’Eridan (Ready Cash) et de Gunilla d’Atout (Ready Cash). Mon rêve est d’élever un ou une gagnant(e) de Groupe 1."

Dimitria, la lignée dans le vent
Née en 1969 et titulaire d’un record de 1’15’’4, Dimitria (Mario) était une des meilleures juments de son époque avec un palmarès de championne internationale. Son palmarès compte notamment l’Elitloppet (1976) et la Loterie (1975). Elle s’est muée en matrone d’exception au haras grâce à Une Crown (Speedy Crown). Cette dernière est à l’origine d’Etta Extra (Florestan), la mère de Qualita Bourbon (Love You), de Mara Bourbon (And Arifant) ou encore de Kaméra Bourbon (Cézio Josselyn) d’où Vita Bourbon (Love You) qui a donné le crack Face Time Bourbon (Ready Cash).

Un haras qui se déplace pour s’agrandir
La question des terres et des surfaces n’a pas épargné François Van de Woestyne dans la montée en puissance de son haras. La structure a déjà dû déménager et va de nouveau changer de site en fin d’année pour s’agrandir : "Au départ, l’écurie était située à Saint-Gatien-des-Bois, à proximité de Deauville, et rapidement la place nous a manqué. Nous avons alors investi, il y a douze ans, dans un domaine de 35 hectares sur la commune de Saint-Maclou [N.D.L.R. : non loin de Saint-Gatien-des-Bois mais situé dans le département de l’Eure]. Le terrain était nu et nous avons pu construire l’intégralité des structures, avec un côté pour l’élevage et un autre réservé à l’entraînement. Nous disposons au final d’un équipement moderne très fonctionnel. L’écurie étant sans cesse en développement, il a fallu trouver plus grand. J’ai acquis récemment une nouvelle ferme avec plus de terres à côté de Saint-Pierre-sur-Dives. Dès cet automne, l’élevage prendra ses nouveaux quartiers avant d’être rejoint par l’entraînement l’été suivant."

Le choix des étalons
Impossible d’éluder la question des croisements avec un éleveur aussi actif que François Van de Woestyne qui fonctionne à la fois avec le cœur et la raison. "J’ai toujours beaucoup aimé Timoko (Imoko) qui m’a donné Douchka Wind, une gagnante de 19 courses. Tout comme Bird Parker (Ready Cash), le père de Guerrière Wind. Bien évidemment, des étalons comme Bold Eagle (Ready Cash) et Face Time Bourbon (Ready Cash), qui étaient des phénomènes s’imposent. Au début j’allais vraiment aux étalons qui j’aimais bien et puis j’ai investi dans des parts d’étalons. Le fait d’être porteur de part m’a de fait un peu obligé à les utiliser. Je vais réduire mon parc d’étalons et me concentrer sur les réels besoins de mes poulinières. Pour un cheval comme Elixir Wind, j’étais convaincu que le croisement de Nahar de Béval (Ganymède) avec Tacana (Orlando Vici) fonctionnerait. Cela a bien marché."

18 ans de passion addictive
À l’heure d’un bilan, il faut rappeler que "cela n’a pas toujours été simple. Pendant un bon nombre d’années, nous avons connu des déceptions", commence le fondateur de l’Ecurie du Haras des Quatre Vents. "Ce qui est sûr est que nous sommes vraiment accros. Objectivement, nous avons beaucoup plus pleuré que ri. Depuis quelques saisons, nous prenons beaucoup plus de plaisir avec les victoires qui s’enchaînent. Nous sommes conscients que tout peut s’arrêter du jour au lendemain avec les blessures ou maladies lorsque l’on travaille avec du vivant comme les chevaux. J’ai néanmoins le sentiment que nous avons construit une base assez solide et stable. Même s’il y aura encore des hauts et des bas, nous devrions continuer à nous faire plaisir. L’idéal serait de se maintenir à ce niveau pendant plusieurs années. Le rêve ultime serait de remporter le Prix d’Amérique, l’épreuve par laquelle la passion est arrivée."
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Mille Fleurs et Nobellse de Busset, deux poulinières importantes pour le Haras des Quatre Vents

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