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Actualité - 20.07.2023

Et Kimberland ressurgit des livres d'histoire

Un vent de jeunesse souffle sur l’étalon Kimberland ! Les deux courses de 2 ans s’étant courues jusqu’alors ont, en effet, été remportées par deux pouliches mettant en exergue le fils de Nevele Pride et Astrasia, tandis que douze des seize lots proposés, ce vendredi, à la vente Pop-Up Qualifs d’Arqana Trot, organisée en partenariat avec Province Courses, sont pareillement, d’une manière ou d’une autre, frappés de son sceau. De quoi célébrer le souvenir de ce compétiteur au profil et à l’itinéraire singulier, devenu un étalon de premier plan et demeurant extrêmement présent dans les pedigrees d’aujourd’hui.



Kimberland 1’14’’ fait figure, en vérité, de pionnier. Avec Florestan et Granit, il complète le trio de performers, puis d’étalons, nés, dans les années 1970, de la volonté de ceux qui les ont conçus d’unir le meilleur du sang trotteur français au meilleur de son homologue standardbred. Seulement, à l’époque, il fallait oser, car nul protocole n’avait été établi et les produits issus de ces croisements franco-américains ne pouvaient être voués, en France, qu’aux courses internationales, sachant que celles labellisées « européennes » n’existaient pas. Dès lors, ils devaient, au moins dans les premiers temps, se cantonner à l’étranger, avant, le cas échéant, de s’aligner au plus haut niveau à l’intérieur de nos frontières, mais encore fallait-il qu’ils aient suffisamment de qualité.
Une performance de pointe dans le « René Ballière »

Ainsi Kimberland fit-il ses classes aux Etats-Unis, grimpant progressivement les échelons. Puis il vint en Europe, aux couleurs de l’Ecurie Rouzaud, ex-Olry-Roederer, avec pour entraîneur Jean Riaud. Le cheval manifesta, alors, beaucoup de classe, s’imposant avec un grand brio, de toute une distance, dans une édition du Prix de Bruxelles (2.150 mètres, autostart), à Enghien. Mais, outre de bons classements dans des Grands Prix, à l’étranger, principalement en Belgique et aux Pays-Bas, il signa sa performance de pointe lors de ses débuts sur la grande piste de Vincennes, dans le Prix René Ballière (2.100 mètres, autostart), où il fit sensation, finissant en bolide, à l’extérieur de la piste, tout en penchant, pour échouer d’extrême justesse face à Lutin d’Isigny ; du même coup, il devançait Idéal du Gazeau, Ianthin, Lançon et autres. Une performance qui situe ses moyens et place, implicitement, la barre très haut.

Où l’on reparle d’Arlington Dream

Kimberland était né en 1976, en Amérique, où sa mère, la jument française, Astrasia, avait été envoyée, pour être présentée à des étalons standardbreds.
Cette fille du crack Jamin était une propre sœur de la classique montée Tessa II et la tante du vainqueur du Prix de Cornulier, Kaprius. Elle-même n’avait pas couru, mais, évidemment, elle avait son pedigree pour elle. D’un beau modèle, elle se prêtait, en outre, à l’alliance recherchée. Elle rencontra, à chaque fois, des descendants de Star’s Pride, tour à tour Nevele Pride, à deux reprises, Hickory Pride, Carlisle et Super Bowl, lui aussi deux fois. Elle était stationnée chez le grand professionnel américain Delvin Miller qui, une année sur deux, gardait les produits. C’était le deal, comme l’on dit. Kimberland a été le meilleur des six produits nés là-bas. Il y eut aussi, cependant, Queensland, une fille de Super Bowl vierge de performances, mais qui produisit bien, sur notre sol, et se continua favorablement, étant la grand-mère de la semi-classique sous la selle Ialla Clairchamp, laquelle deviendra la mère du champion hongre, millionnaire en euros, Arlington Dream.

Un phénomène nommé Nevele Pride

Le père de Kimberland, Nevele Pride, fut un phénomène, outre-Atlantique, élu « Cheval de l’Année » à 2, 3 et 4 ans. Aussi vite que précoce, il gagna vingt-six courses à 2 ans (sic !), en vingt-neuf sorties, puis enleva la Triple Couronne, à 3 ans, constituée de l’Hambletonian, du Kentucky Futurity et du Yonkers Futurity. A 4 ans, il battit, en 1’11’’3, sur le mile, le vieux record du monde de vitesse établi par Greyhound et il le garda longtemps. A la stupeur du public américain, il fut toutefois dominé par notre Une de Mai dans le Championnat du Monde, baptisé alors Roosevelt International. Réputé difficile de caractère –Stanley Dancer, son célèbre mentor, résumera, à ce sujet : « Tous les bons ont du caractère. »–, Nevele Pride était, surtout, très dur et courageux à la lutte. Ses meilleurs produits américains furent Zoot Suit, géniteur de tête, en Suède, Pershing ou encore Bonefish, aïeul, chez nous, de l’étalon champion Viking’s Way et ancêtre, du même coup, d’un certain Ready Cash.

Ci-dessous, le pedigree de La Vie Est Belle dont la grand-mère Boccacia est donc la soeur de Kimberland.

Ready Cash 1'10''3 Indy de Vive 1'11''9
Alto de Viette 1'11''6 Kidea 1'18''2
Mini Ceinture 1'16''9 Dahir de Prelong 1'14''2
LA VIE EST BELLE Ceinture 1'14''6
Quadrophenio 1'13''9 Dekeel
Quimbaya d'Em 1'13''8 Halte A La Biche
Boccacia 1'24''4 Lurabo 1'13''7
Astrasia
©DRLa Vie Est Belle, héritière, d'une certaine façon de Kimberland
Le rôle, déterminant, des Haras Nationaux

Kimberland était un joli cheval, de petite taille –il « toisait » un mètre cinquante-six–, avec une tête expressive, de la densité et de beaux tissus, physiquement très américain, en fait. Comme ses contemporains, les frères Florestan et Granit, représentants, eux aussi, de la prestigieuse lignée mâle de Star’s Pride, il a été intelligemment acquis, au sortir de sa carrière de course, par les Haras Nationaux, qui, de la sorte, les ont fait, tous trois, accéder au stud-book trotteur français. C’était dans l’intérêt de l’élevage et ce fut fort bienvenu. Hélas disparus, alors que leur rôle était essentiel, les Haras Nationaux procéderont de même, un peu plus tard, avec les purs américains, Workaholic, étalon phare, et Mickey Viking, auteur du susnommé Viking’s Way. Que ne leur doit-on pas en la matière ? Les étalons furent, de surcroît, répartis ici et là, dans nos régions, le but étant de mettre à la disposition du plus grand nombre d’éleveurs, un peu partout en France, la meilleure génétique.

"Le bistrot situé en face du Haras de Lamballe s’appelait même « Le Kimberland » ! " Philippe de Quatrebarbes

Du jamais vu, de mémoire de breton

L’américain Kimberland devint donc breton d’adoption, prenant ses quartiers au Haras National de Lamballe, dans les Côtes-d’Armor. Philippe de Quatrebarbes, qui dirigea le haras, plusieurs années durant, se souvient parfaitement de lui : « Il était très facile. A l’occasion, nous l’attelions même en tandem, avec son cadet, Laudanum (N.D.L.R. : notre photo en page suivante). Il était prolifique, mais son petit défaut était d’être assez froid au moment de saillir. Quand il fonctionnait en monte naturelle, il n’était pas rare qu’il contraigne les éleveurs, venus lui amener leurs juments, à attendre plusieurs heures pour qu’il remplisse son office. Une fois, cela s’est même passé sur deux jours ! Plus tard, en insémination artificielle, les choses sont devenues progressivement plus simples. Le cheval a fait toute sa carrière d’étalon à la station de Landivisiau, dans le Finistère. Il était devenu une célébrité, en Bretagne. Dans ses grandes années, il a eu jusqu’à mille inscriptions, émanant de la France entière, et on tirait au sort cent cartes seulement. De mémoire d’éleveur breton, cela ne s’était jamais vu ! Le bistrot situé en face du Haras de Lamballe s’appelait même « Le Kimberland » ! »

Il offre le « Cornulier » à la Bretagne !

Kimberland a ainsi permis à un éleveur breton, Pierre Le Forestier, de briller dans le Prix de Cornulier, grâce à Voici du Niel, vainqueur de l’édition 1992, aux dépens des champions Vivier de Montfort et Queila Gédé. Ce Voici du Niel est l’un des quatre gagnants de Groupe 1 engendrés par Kimberland, les trois autres étant Ulf d’Ombrée (Critérium des Jeunes, Prix Capucine, aujourd’hui prix Albert Viel), Vainqueur Ker Anna (Saint-Léger des Trotteurs) et Isadora d’Ombrée (Prix de l’Etoile, Grand Prix de l’U.E.T.). Le professionnel suédois, installé en France, Ulf Nordin, adorait Kimberland et ce n’est pas un hasard si ce quatuor l’avait pour mentor commun. De même, le regretté Jean-Raoul Deshayes, l’homme des 'Ombrée', était un fan de Kimberland.

Ci-dessous le pedigree de Lembellie Verderie, laquelle présente la particularité d'être inbreed sur Kimberland 5x3

Prodigious 1'11''1 Goetmals Wood 1'11''9
Carat Williams 1'10''7 Imagine d'Odyssee
Miss Williams 1'16''9 Sancho Panca 1'15''2
LEMBELIE VERDERIE Quara Williams 1'17''1
Chef du Chatelet 1'15''4 Kimberland (US)
Quavana Verderie 1'14''5 Quirola 1'22''7
Javana Tenor de Baune 1'14''3
Doradora
©ProvinceCourses
Des 2 ans dans le moule

La Vie Est Belle (Alto de Viette) a enlevé la première course de 2 ans, sur l’hippodrome ornais de Rânes, le dimanche 9 juillet. Sa grand-mère, Boccacia, est, tout bonnement, la sœur utérine, par Lurabo, de Kimberland. Et, comme ce dernier est présent du côté paternel, où figure sa célèbre fille, Tahitienne, la pouliche est inbred sur Astrasia (7x3), la mère du frère et de la sœur. Lembelie Verderie (Carat Williams) s’est imposée, pour sa part, au Touquet, dans le département du Pas-de-Calais, lors de la deuxième compétition pour 2 ans de la saison, le jour de la Fête Nationale. Elle est consanguine sur Kimberland (5x3) et sur la grand-mère de celui-ci, Isésia (6x5x5). Quant aux 2 ans inscrits au catalogue de la vente Pop-Up Qualifs d’Arqana Trot, le sang de Kimberland imprègne, très majoritairement, leurs pedigrees, essentiellement via Tahitienne, avec, souvent, un ou plusieurs inbreedings à la clef. C’est ce qui s’appelle être dans le vent.


Son chef-d’œuvre : Tahitienne

La réussite d’étalon de Kimberland s’augmente de nombreuses autres distinctions, y compris à l’échelon classique, avec les placés, dans ce registre, Topaze d’Ombrée, Ufland, Varum d’Ombrée, Fanacland ou bien Harazina. En prolongement, si ces fils l’ont continué avec un certain succès, ses filles ont fait encore mieux, à commencer par la première d’entre toutes, l’exceptionnelle Tahitienne, assurément l’une des grandes matrones de l’après-guerre, mère de l’étalon de tête Goetmals Wood, de la triple lauréate de Groupe 1, Mahana (Critérium des Jeunes, Prix Albert Viel, Championnat Européen des 3 Ans), d’Extreme Dream, le père de mère de Ready Cash, ou encore des semi-classiques Bon Conseil et Cassette. Rien qu’à ce titre, Kimberland mérite la postérité qui est la sienne.

Kimberland (ici en 2ème dans le duo) lors de sa période Haras Nationaux
un autre temps

©DR
©Aprh
Kimberland lors de l'un de ses succès probants à Enghien dans le Prix de Bruxelles

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