Rêve d’Udon, le TF dans toute sa splendeur

En 1975, Equiléo fait sien le Critérium des 5 Ans, sous les couleurs de la star Alain Delon. L’été suivant, ce petit cheval bai, tout en harmonie, terrasse l’ogre Bellino II, à New York, dans le "Championnat du Monde". Quatre ans après Equiléo, en 1979, un autre futur Champion du Monde s’octroie le Critérium des 5 Ans, à savoir Idéal du Gazeau, dit "Petit Bonhomme". Le trapu cheval noir, aux bottines bleues, va faire mieux encore que son aîné, puisque trois fois vainqueur de l’International Trot. En 1988, c’est un sujet d’un tout autre profil qui s’adjuge le Critérium des 5 Ans : le représentant de Jean Boisard et des frères Desmontils, Rêve d’Udon, est un grand et puissant modèle, à son affaire tant attelé que monté. Avant son Critérium victorieux, il a gagné le Prix du Président de la République ; après, il vaincra dans le Prix de Cornulier, pour ne concéder ensuite le Prix d’Amérique qu’à Ténor de Baune. Or, lui aussi va aller se couvrir de gloire aux Etats-Unis, y étant sacré numéro un mondial en 1990. Cela pour souligner la variété d’aptitudes du trotteur français – quel que soit son physique –, des 3.000 mètres du Critérium des 5 Ans, sur la grande piste de Vincennes, aux 2.000 mètres du "tourniquet" américain, tout en s’adaptant, éventuellement, à porter l’homme, plutôt que de le tirer.

Etalon, Rêve d’Udon produira Offshore Dream, double vainqueur du Prix d’Amérique – et, soit dit au passage, dauphin d’Ozio Royal, dans le Critérium des 5 Ans 2007 –, et il se perpétuera, comme en prolongement de sa carrière de course, par-delà l’Atlantique, grâce à son fils franco-américain, Revenue, lauréat, là-bas, du prestigieux Nat Ray et auteur, plus tard, d’un gagnant de l’Hambletonian en Market Share. A ce jour, celui-ci demeure le seul vainqueur de la plus grande course américaine à descendre d’un chef de race trotteur français, en l’occurrence Kerjacques, aïeul paternel de Rêve d’Udon.

Coktail Jet, à l’exemple de Kerjacques

1995 est l’année de l’avènement de Coktail Jet, celle de son véritable envol, de ses premiers succès de Groupe 1 sur notre sol, même s’il a déjà ouvert son palmarès, à ce niveau, en Italie, à 4 ans, dans le Gran Premio d’Europa. Au mois de juin, l’élève de Jean-Etienne Dubois, paré de la casaque Wildenstein, bat son aîné, Abo Volo, dans le Prix René Ballière. Un peu plus tard, au cœur de l’été, il va enchaîner deux succès du même ordre dans le Critérium des 5 Ans et le Prix de l’Etoile. A chaque fois, son adversaire le plus redoutable est son compagnon de casaque, coaché, quant à lui, par Jean-Pierre Dubois, Camino, qu’il domine, cependant, sûrement, quoique de peu. Avant ce prestigieux doublé, Coktail Jet est passé par le mile d’Enghien et le Prix de Washington, où il a rallié le poteau en vainqueur sur le pied de 1’11’’2, soit le record de France de vitesse, qui le fait devenir, de surcroît, le trotteur français le plus rapide de tous les temps, y compris à l’étranger. On y revient : des 1.609 mètres du tracé plat d’Enghien aux 3.000 mètres, en dénivelé, de la grande piste de Vincennes, il y a une rue, comme disaient les turfistes du temps jadis. Mais le trotteur français, parfaitement éclectique, s’adapte à tout.

Coktail Jet en fournira une nouvelle preuve la saison suivante, au cours de laquelle, euphorique, il réussit la passe de quatre du Prix d’Amérique (Vincennes, 2.700 mètres), du Prix de France (Vincennes, 2.100 mètres, autostart), du Prix de l’Atlantique (Enghien, 2.150 mètres, autostart) et de l’Elitloppet (Solvalla, 1.609 mètres, autostart). A la différence de nos susnommés référents dans le Critérium des 5 Ans, il est, lui, semi-américain. A la reproduction, cela l’a servi, tant commercialement que génétiquement, effet d’hétérosis à la clef, et il est devenu l’un de nos étalons de tête majeurs, au cours de ce dernier demi-siècle, en compagnie, notamment, de Kerjacques, autre vainqueur de la plus belle course de notre programme dédiée aux 5 ans.