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Marius Durville
Actualité - 20.05.2024

Marius Durville, le premier jour du reste de sa vie

Une. C’est le nombre de victoire qu’il manque à Marius Durville avant de passer professionnel. Véritable révélation chez les apprentis au monté depuis l’an dernier, le vainqueur du Prix Yvonnick Bodin (Groupe 3) cet hiver pointe à la 6ème place du classement de l’Étrier d’Or. Des résultats gratifiants obtenus notamment avec le concours de son patron, Benoît Carpentier, mais qui n’empêche pas le jeune Normand de 19 ans de s’interroger sur la suite.

Il n'est ni le premier, ni le dernier à connaître cette situation. Celle de l'apprenti qui s'apprête à entrer de plein pied dans le métier qu'il s'est choisi et à devoir confirmer face aux seuls professionnels. Cinquante victoires, c'est peu et beaucoup à la fois. C'est le cap que Marius DURVILLE s'apprête à son tour à atteindre, vingt-six mois après avoir passé pour la première fois en tête un poteau d'arrivée. Ce succès initial et déclencheur en selle sur HITA SANTIGNY (Uniclove), il s'en souvient évidemment. Petit-fils d'entraîneur et fils d'amateur, Marius Durville a rapidement su qu'il aurait un jour sa place au sein des pelotons "Tous les dimanches ou presque, j’accompagnais mon père aux courses. J'étais passionné. Mais je n’avais jamais dit à mes parents que je voulais en faire mon métier, se souvient-il en souriant. C'est seulement à la fin du collège, au moment de choisir l’orientation entre le lycée général où je ne me voyais pas tenir trois ans et l’AFASEC de Graignes, que je leur en ai parlé."
Ce qui n'a nullement surpris son père, Frédéric DURVILLE, valeur sûre au sein des pelotons d'amateurs de Normandie et d'ailleurs : "Je me doutais qu'il nous le dirait car il était mordu. Il avait les capacités de faire un Bac général mais il a voulu aller à Graignes. C’était son choix. Je ne voulais pas le frustrer comme je l’avais été moi-même. Mon père (Serge), entraîneur, m’avait en effet strictement interdit de faire le métier. J’ai mis vingt-cinq ans à m’apercevoir qu’il avait raison. Maintenant, ce ne sont pas les mêmes époques et les situations sont différentes".
Le fiston n'avait visiblement pas tort de choisir cette voie comme le montre son titre de champion de France des apprentis montés la saison dernière. Une saison ponctuée en fanfare par une victoire dans le Prix Yvonnick Bodin (Groupe 3) en selle sur ESPERANZA IDOLE (Quido du Goutier), le "Cornulier" des apprentis un mois avant le "vrai" Prix de Cornulier (Groupe 1) que la jument de Noël LANGLOIS allait aussi remporter.

Il a un don à cheval qui est indéniable. Ensuite, il a su le travailler comme il a travaillé sa position. (Frédéric Durville)

"Il a un don à cheval qui est indéniable. Ensuite, il a su le travailler comme il a travaillé sa position par rapport à ce que lui ont apporté ses deux principaux maîtres d’apprentissage, Anthony Dollion et Benoît Carpentier", juge son père. Le travail n'est pas un mot qui fait peur au jeune homme. Il revient même systématiquement quand on parle de lui. N'est-ce pas Benoît Carpentier ? "C'est vrai, c'est un travailleur. Il n'y a d'ailleurs plus beaucoup de jeunes comme lui", assure en guise de réponse celui que Marius Durville a contacté après avoir lu une petite annonce pour un poste à pourvoir au sein de l'écurie. "J’étais intéressé car il y avait beaucoup de chevaux montés. Benoît m’a même fait gagner deux courses avant que je n’arrive à l'écurie. Il m’a vraiment donné sa confiance, apprécie Marius Durville qui l'a rejoint au cours de l'année 2022. Anthony (Dollion) m’a apporté les bases mais il n’avait pas trop de chevaux d’apprentis, ni trop de chevaux à courir. C'est lui-même qui m’a conseillé de changer. Quand j’ai fini mon apprentissage, je suis parti." Direction la Mayenne pour un choix encore gagnant. À ce jour, 28 de ses 49 gagnants l'ont été en effet pour l'entraînement de Benoît Carpentier.

Marius Durville en chiffres (*)
◆ 19 ans
◆ Champion de France des apprentis montés en 2023
◆ 1ère course le 22/11/20 à Nantes avec ELANCEE DE GUERON (dai)
◆ 1ère victoire le 27/03/22 à Gournay-en-Bray avec HITA SANTIGNY
◆ 573 courses (465 au monté / 108 à l'attelé)
◆ 49 victoires (45 / 4) dont le Prix Yvonnick Bodin (Groupe 3)
(*) chiffres arrêtés au 19/05/24

"Il est à l'écoute de ce que l'on peut lui dire. On a ainsi travaillé sur sa position à cheval car je le trouvais parfois "brutal". Le fait de rallonger un peu sa monte a corrigé cela, juge Benoît Carpentier dont Marius Durville est devenu le premier garçon. Il a une telle capacité de travail qu'il veut parfois aller trop vite. Ce serait son petit défaut. Il a de bonnes bases auxquelles il peut toujours revenir quand il est un peu perdu." Perdu, le Normand ne le semble pas même si le rythme des derniers mois est intense. "Je ne vois pas le temps passé, reconnaît-il. C’est beaucoup de travail. Je ne travaillerai peut-être pas autant toute ma vie. Mais j'ai l’envie de réussir."

Une appréhension pour un passage obligé

À l'aube du premier jour du reste de sa vie, celle de professionnel après laquelle il court pourtant depuis ses débuts, Marius Durville ne cache pas néanmoins une certaine appréhension.


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Son succès dans le Prix Yvonnick Bodin

Même le meilleur apprenti monté en titre, qui occupe la 6ème place du classement de l'Étrier d'Or - "quand on évolue au top niveau des apprentis, c’est assez facile entre guillemets d’enchaîner les victoires. Ça explique ma position au classement en ce début d’année", nuance-t-il toujours la tête sur les épaules -, est en proie à des interrogations sur son avenir immédiat une fois qu'il aura atteint le cap des 50 victoires. "Je suis content car c'est une satisfaction, mais c’est difficile de ne pas y penser, confie Marius Durville. Quand cela leur arrive, les enfants d’entraîneur y pensent aussi alors qu’ils ont l’écurie familiale derrière eux. Ce qui m’inquiète c’est de passer du top niveau en apprentis aux courses de province, de passer l’hiver à la maison, tout ça… Ça va changer. Je n’ai pas peur de travailler mais est-ce que ça va suffire ? Maintenant, je ne me plains pas car je sais pouvoir compter sur le soutien de Benoît (Carpentier)."

Je n’ai pas peur de travailler mais est-ce que ça va suffire ? (Marius Durville)

À l'approche de ce "basculement", les échanges quotidiens entre le père et le fils prennent encore plus d'importance, alors que les occasions de se voir sont rares si ce n'est sur les champs de courses quand le premier arrive à se libérer de son travail dans la grande distribution. "C’est le sujet du moment, confirme Frédéric Durville. Il est un peu inquiet et se demande quels sont les entraîneurs qui vont continuer à l'appeler parmi ceux qui lui ont fait confiance. Forcément, des courses vont se fermer. Aujourd’hui, il court avec des apprentis peut-être moins expérimentés que lui mais il court également avec des pros face auxquels il tient sa place. On a eu encore l’exemple la semaine dernière à Vincennes dans la même réunion avec Iberik de Mongochy en apprentis et Lolly Star en pros. Mais il ne peut s'empêcher de se poser des questions qu’un gamin de cet âge-là ne devrait pas se poser. Il devrait être content et heureux de passer professionnel mais ce n’est pas vraiment le cas. Il va falloir qu’on l’entoure."
Le jeune homme peut aussi compter sur ce qui fait sa force depuis ses débuts et ce que son père rappelle : "Il se remet en cause tout le temps, ce qui est une grosse qualité. Il est un peu comme moi, il n’est jamais satisfait de la situation. Il peut lui arriver de faire des erreurs mais il le sait tout de suite. Il analyse très vite. C’est dans sa nature". "Il est fait un peu dans le même moule qu'un garçon comme Alan Gendrot, complète Benoît Carpentier. C'est un garçon discret et bien éduqué. Sa capacité de travail lui permettra toujours de rebondir et de revenir aux bases."

La répartition de ses gagnants :
◆ 2022 : 11 victoires (127 courses)
◆ 2023 : 22 victoires (265 courses)
◆ 2024 : 16 victoires (122 courses)
◆ 28 victoires pour Benoît Carpentier
◆ 4 victoires pour Charles-Antoine Mary
◆ 3 victoires : pour Arnaud Morin et Guillaume Cardine
◆ 1 victoire : pour Noël Langlois, Franck Terry, Anthony Dollion, Pierre-Louis Desaunette, Franck Leblanc, Daniel Béthouart, Bastien Joseph, Nicolas Raimbeaux, Emmanuel Varin et Luc Gaborit

Mais au-delà de ses craintes et appréhensions légitimes, comment envisage-t-il la suite concrètement ? "On en a discuté avec Benoît, avance-t-il, qui me fait driver de plus en plus en province, une discipline où je dois progresser, ce qui se fera en courant davantage. Pour le moment, je n'envisage pas de changer d'environnement." "Pour moi, ça ne va rien changer, prolonge son patron. J'ai une écurie composée de pas mal de chevaux montés et je vais continuer à faire appel à Marius pour les monter." Dès qu'il aura atteint ce fameux cap, se posera entre autres une question dont Marius Durville a déjà parlé avec ses proches, ses parents comme son patron : celui du recours à un agent. "On en a discuté mais, pour le moment, aucune décision n’a été prise. Je n'ai pas non plus été sollicité jusqu’à maintenant", confie-t-il.

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Marius avec son père Frédéric

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