Général du Pommeau étoile parmi les étoiles

Le crack Général du Pommeau (Sebrazac) s'est éteint ce dimanche 9 juin 2024 à l'âge de 30 ans. "Il est parti de sa belle mort" précise Régis Breux, responsable du Haras du Pays d'Auge où le champion coulait une paisible retraite. Général du Pommeau, auteur d'une carrière à l'extraordinaire longévité, aura certainement aussi été le dernier trotteur connu du grand public.

Né au printemps 1994, GENERAL DU POMMEAU (Sebrazac) a été le formidable porte-drapeau du trot français pendant près de huit ans. Il est le témoin d'un temps presque révolu, celui des trotteurs ultra-populaires, tout en étant résolument tourné vers le futur, lui qui semblait voler les pieds nus. Une sorte d'héritier d'Ourasi et d'Idéal du Gazeau dans sa capacité à soulever l'enthousiasme d'un public qui pouvait s'identifier à travers ce petit gars de la Manche, haut comme trois pommes du Calvados, entraîné par celui qui aurait pu être le voisin de tout le monde, Jules Lepennetier. Mais aussi de précurseur du trot moderne, toujours plus rapide, et de vedette des écrans télévisés quand les courses trouvaient un écho nouveau sur la jeune Equidia et un peu plus tard sur l'antenne de Canal+. "Général", du haut de ses 1,58m au garrot, était le cheval de l'an 2000, vainqueur de sa plus grande course, le Prix d'Amérique, l'année du millénaire en devenant le premier cheval de l'histoire de la course à passer sous la barre des 1'13'' en réduction kilométrique : 1'12''6, soit 1'7'' plus rapide que le précédent record. Un Général supersonique.

Le record tiendra quatre ans avant que Kesaco Phedo ne l'abaisse de trois dixièmes. Général du Pommeau, 10ans, était encore et toujours là, prenant même la 3ème place, au crépuscule d'une carrière hors-normes.
Général du Pommeau a construit sa légende sur la piste, à la force du jarret, pas à pas. Un success-story tout sauf écrite à l'avance comme le rappelait son éleveur Jean Pichon à Jacques Pauc dans 'L'alphabet du trotteur' : "Il était si petit qu'il était inutile que je l'inscrive aux ventes de yearlings... J'avais quatre "G" cette année-là et lui n'intéressait personne." Il vendra finalement la moitié du poulain à un ami : Jacky Grisanti. Placé à l'entraînement chez Jules Lepennetier, celui-ci expliquera plus tard : "Il était vraiment petit et faisait beaucoup de fautes au début... Je me posais des questions... Je l'avais qualifié "juste" en 1'24"1 début juillet de ses 2 ans. Mais dès qu'il a couru il a été transformé !"


Sa carrière au haras n'aura aucunement le même lustre et les belles performances de Marquis du Pommeau en Suède et de Talicia Bella en France ne permettront pas d'ajouter à sa carte d'identité un étoile supplémentaire en qualité de reproducteur.

"Lorsque je suis venu le soigner ce matin, il était couché, nous confie Régis Breux, responsable du Haras du Pays d'Auge. Il est parti de sa belle mort, sans souffrance. C'est une grande page des courses qui se tourne avec sa disparition. Général était un grand champion en piste et attachant au quotidien avec son caractère bien trempé mais un cœur énorme. Il laissera un grand vide au haras. Nous avions fêté ses 30 ans et cela avait été une belle fête. Nous garderons beaucoup de souvenirs avec lui." Il y a quelques semaines, les amoureux du champion s'étaient réunis au Haras du Pays d'Auge pour célébrer le 30ème anniversaire du champion. Guillaume Bernier, qui fut son lad durant sa carrière, n'aurait manqué ce rendez-vous pour rien au monde. Particulièrement ému, il nous a dit : "Je suis allé le voir au haras le 3 mai dernier, jour de ses 30 ans avec ma compagne Clotilde et ses propriétaires Mr et Mme Grisanti ainsi que Mr Pichon. Dès mon arrivée dans son box, il a posé sa tête dans mes bras, comme avant chacune de ses courses. Ma compagne n'a pu retenir ses larmes en voyant ce geste de sa part. J'ai appris la nouvelle ce midi et c'est une grande page des courses qui se tourne. J'ai tout gardé de Général et je pourrais même ouvrir un petit musée. Il avait du caractère mais aussi une incroyable gentillesse. Il a été magistral sur les pistes. Bien sûr, sa victoire dans le Prix d'Amérique a été l'un des grands moments de sa carrière. Mais pour moi, sa plus belle course restera sa victoire dans le Prix René Ballière en 1999 où, au prix d'une fin de course magnifique, il était venu coiffer Remington Crown sur le poteau. Sa 2ème place dans l'Elitloppet derrière Victory Tilly restera comme le seul regret, pas de sa performance, loin de là, mais il avait superbement travaillé en compagnie de Jules sur l'hippodrome du Mont-Saint-Michel et je pensais réellement qu'il ne serait pas devancé. Au quotidien, il était hyper gentil. Il avait ses petites manies comme le fait de sortir du barn et de regarder pendant plusieurs minutes, comme s'il s'assurait que tout était bien à sa place, avant de partir en piste. Et si mes collègues ne tournaient pas sur la même corde que nous, il était capable de me faire un demi-tour. C'était lui le chef ! Je suis heureux d'avoir partager sa carrière et d'avoir également remporté ma 100ème victoire comme driver avec sa casaque à Challans le 25 février au sulky de Kymi Jack, propriété de Mr et Mme Grisanti."