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Actualité - 17.04.2022

Gianni Fascella : "Autant faire ce que j'aime"

La casaque du propriétaire Gianni Fascella est apparue sur les programmes voilà un peu plus de trois ans. Depuis, elle s’est régulièrement mise en évidence - 37 victoires pour un peu plus de 170 courses - principalement avec de jeunes éléments comme Instrumentaliste et It’s A Dollarmaker, vainqueur ce samedi. La semaine dernière, le premier produit de son élevage, Jona de Rêve d’Or, a débuté. Ce quarantenaire de La Louvière, à une vingtaine de kilomètres de Mons (Belgique), travaille dans la construction et l’immobilier avec son père et son frère qui se sont pris au jeu comme toute la famille. Éleveur aussi de chiens de races et de pigeons voyageurs, il s’est découvert une nouvelle passion pour laquelle il consent une politique d’achat volontariste.

24 Heures au Trot. Quels sont vos premiers souvenirs de courses de trot ?
Gianni Fascella. J’ai un ami maréchal-ferrant, Paul Naets, qui a ferré des trotteurs toute sa vie et m’a emmené la première fois voir des courses de trot. Puis cela s’est fait en regardant les courses de Ready Cash, la première que j’ai regardée à la télé est sa première victoire dans le Prix d’Amérique. À cette époque, j’aimais bien Ready Cash et Roxane Griff dont je regardais les courses d’un œil détaché, puis il y a eu Bold Eagle. J’ai surtout beaucoup accroché avec lui. Il me donnait beaucoup d’émotions à le regarder trotter. Son attitude en règle générale m’a toujours donné des émotions que je n’arrivais pas spécialement à comprendre.

Qu’est-ce qui a fait qu’un jour vous avez décidé de devenir propriétaire de trotteurs ?
L’élément déclencheur a été de me retrouver allongé dans une chambre d’hôpital pendant plusieurs semaines à la suite d’une opération du dos. Mon ami Paul Naets est passé me voir et m’a dit qu’il y avait une belle course à venir de Bold Eagle. Le jour en question, j’étais tout seul dans ma chambre. J’ai regardé quatre fois la course et les quatre fois j’ai eu des frissons. Comme je n’avais rien d’autre à faire, j’ai profité de ces semaines pour m’intéresser davantage, regarder ce qui se faisait, quels étaient les entraîneurs tête de liste, etc. Comme j’aimais bien Bold Eagle, je me suis renseigné sur Sébastien Guarato d’autant que j’aimais bien son franc-parler et sa manière d’être, à savoir quelqu’un qui ne se prend pas la tête. Dans la situation qui était alors la mienne sur un lit d’hôpital, je me suis dit autant faire des choses que j’aime. Ma motivation a été d’essayer de vivre ma passion.

Quelle a été votre démarche alors ?
Je me suis beaucoup renseigné au début, car je voulais avoir des connaissances avant de m’impliquer vraiment, au point que c’est presque devenu une occupation quotidienne afin d’apprendre un maximum de choses car j’avais évidemment énormément de lacunes. Ce que j’aime c’est la compétition. J’y suis habitué avec mes élevages de chiens de race et de pigeons mais les courses sont un monde totalement à part. Jusqu’à maintenant, dans mes élevages, je faisais tout moi-même. Là, il faut que je fasse confiance à des gens. Au départ, il y avait d’ailleurs presque une forme de frustration. Mais, au final, c’était un faux ressenti car, dans les courses, on partage énormément de choses avec les amis, la famille.

Un éleveur né
Élever est une seconde nature pour Gianni Fascella. "Depuis que je suis enfant, mon hobby a toujours été l’élevage. J’ai élevé tout ce qui était facile à élever, des lapins, des furets, etc., sourit-il. Cela me vient probablement de mon grand-père maternel qui était aussi très porté sur l’élevage des animaux." En parallèle à son activité professionnelle dans la construction et l’immobilier, il élève en tant qu’amateur des chiens de race (des braques allemands) avec lesquels il a obtenu des résultats au niveau international et des pigeons voyageurs. Il a d’ailleurs puisé de son élevage de braques allemands le nom du label - de Rêve d’Or - qu’il a choisi de donner à ses trotteurs (les premiers sont les "J").

Comment avez-vous fait pour réussir à vous introduire dans ce milieu que vous ne connaissiez pas ?
Thomas Bernereau me conseille énormément. Les liens se sont faits très facilement par l’entremise de Marc Gernay, un ami commun. On s’est vus la première fois aux ventes de yearlings d’Arqana à Deauville en 2018. Le courant est très bien passé. Je lui fais entièrement confiance. Cette année-là, on a acheté Haut Brion (Bold Eagle) et Héra d’Atout (Bold Eagle). Ensuite, je me suis assez vite pris au jeu, d’autant que j’ai eu la chance des débutants comme on dit en achetant ces deux yearlings qui ont eu de la réussite. Via Thomas, j’ai eu le contact avec Sébastien Guarato. J’essaye de bien m’entourer, et c’est le cas avec un entourage de confiance et de grande compétence. Ça rend les choses plus encourageantes pour continuer dans ce sens. Aujourd’hui, mes poulinières sont stationnées en Normandie, chez Ludovic et Daphné Picard au Haras de Cordelles. Ce sont des gens hyper compétents, très bien installés. Je n’ai pas les compétences pour bien élever des trotteurs moi-même. Être bien entouré était donc prioritaire à mes yeux. Je pense aussi que la localisation des terres, la qualité des prairies est primordiale. Or, la Normandie est le berceau de l’élevage des chevaux.

Avez-vous fait d’autres rencontres importantes ?
Aux ventes, j’ai fait la connaissance de Pierre Pilarski, de Jean-Pierre Micholet et de la famille Bernereau (père et frère de Thomas). En discutant, on s’est associés sur Haut Brion et, comme je me lançais, ils m’ont dit que le cheval allait courir sous mes couleurs. Depuis, on a acheté d’autres mâles comme It’s A Dollarmaker (Saxo de Vandel) et Instrumentaliste (Ready Cash), qui provient de l’élevage de la famille Bernereau.


J’ai eu la chance des débutants comme on dit.
Gianni Fascella

(© ScoopDyga)
C’est pareil pour Just You And Me (Eridan), le petit frère d’Instrumentaliste, qui vient de s’imposer pour sa deuxième course à Lyon.

Quelle est votre politique d’achat ?
J’ai toujours été très regardant sur les origines dans les élevages que j’ai montés et je ne voulais pas faire différemment. Je préfère avoir moins de chevaux mais très bien nés et qui me plaisent aussi physiquement, c’est un tout. Ça ne m’intéresse pas d’avoir une jument qui n’a pas de papier. L’inverse est vrai aussi, à savoir une jument qui a un papier mais qui physiquement ne me plaît pas ou dont les allures ne me plaisent pas. J’essaye d’être sélectif. Maintenant, ce n’est pas gage de réussite, loin de là, ce serait trop facile.

C’est une politique qui nécessite des investissements importants, n’est-ce pas ?
Mes parents et mon frère m’ont soutenu pour essayer de construire quelque chose de stable et durable, c’est la ligne directrice en quelque sorte. Cela passe en effet par des investissements importants, que ce soit pour les poulinières ou les pouliches appelées à devenir reproductrices comme pour les parts d’étalons et les saillies. Comme investissement de base, je trouvais plus raisonnable d’investir dans des femelles parce qu’il y a une valeur résiduelle au cas où cela ne se passe pas bien en course. C’est pour ça que j’étais attaché à acheter des pouliches bien nées ou des poulinières catégorisées, de première catégorie si possible. Mes choix se sont basés sur mes références à moi. Dans le domaine de l’élevage des chiens, on est très attachés aux allures qui ont énormément d’importance en compétition. J’ai donc toujours été habitué à regarder de très près les allures. Ce n’est pas cependant pour ça que l’on peut comparer les deux domaines. Mais quitte à investir de l’argent, j’aime autant investir dans des femelles, de façon à pouvoir plus ou moins récupérer une partie de mes investissements à l’élevage. Quand un mâle n’est pas bon, il n’est pas bon. Point.



It's A Dollarmaker, vainqueur samedi à Vincennes.


L'année 2022 ne pouvait mieux commencer pour Gianni Fascella et sa famille avec le succès d'Instrumentaliste à Vincennes. (© ScoopDyga)
Et les parts d’étalons ?
J'ai des parts de Face Time Bourbon, Bold Eagle, Eridan, Cash and Go et Orlando Vici, que j’aime bien et qui est facile à croiser. J’essaye d’avoir chaque année une saillie de Love You et une de Ready Cash. Ce sont des investissements lourds motivés par la compétition. Le plaisir est de faire les croisements, de faire naître, c’est très particulier mais ça me tient à cœur. Mes premiers "M" sont nés et je suis déjà en réflexion sur les prochains croisements.

Une passion en famille
Dimanche dernier, c’est en famille que les Fascella se sont rendus depuis la région de Mons en Belgique à Lisieux en Normandie pour assister aux débuts du premier produit issu de l’élevage-maison, nommée Jona de Rêve d’Or (Ready Cash), qui a été disqualifiée. C’est aussi en famille qu’ils étaient venus assister au printemps 2019 à Caen à la qualification de Haut Brion, premier achat quelques mois plus tôt lors des ventes de yearlings. "C’est une belle aventure qui commence, avait alors déclaré Joseph Fascella, le père, dans les colonnes de Province Courses l’Hebdo. Nous découvrons ce milieu. Ce n’est qu'une séance de qualifications mais l’ambiance nous plaît beaucoup. C’est passionnant." Trois ans plus tard, le discours n’a pas changé, bien au contraire. "Dans les courses, on partage énormément de choses avec les amis, la famille. Mes parents sont accrocs, raconte ainsi Gianni Fascella. Les chevaux nous permettent de vivre de très beaux moments. On était déjà très soudés mais les chevaux animent toutes les discussions." Le nom du premier produit de l’élevage à avoir couru est d’ailleurs une contraction des prénoms de ses parents : Jona pour Joseph et Nadine.


Quelle différence voyez-vous entre les élevages que vous connaissez, comme ceux des chiens et des pigeons, et celui des trotteurs ?
Dans l’élevage de chevaux, je n’ai pas assez de recul pour savoir si les décisions prises aujourd’hui au niveau des croisements sont bonnes ; je le verrais dans quelques années. La différence entre un élevage de pigeons par exemple est que j’en élève deux cents par an. La quantité est bien différente et j’ai donc beaucoup plus d’expérience. Cela veut aussi dire que vous avez très vite du recul et que vous pouvez essayer beaucoup de choses sur une année, prendre un risque que vous ne pouvez pas prendre avec les chevaux notamment du point de vue de la consanguinité car ce serait hypothéquer trop d’argent et de temps. L’élevage de chevaux se pense sur le long terme voire même le très long terme. C’est la différence principale que je vois.

Est-ce qu’il y en a d’autres à vos yeux ?
Des éleveurs qui ont un grand nombre de juments tout en gardant un niveau de qualité élevé peuvent se permettre parfois de prendre un risque que l’éleveur qui a moins de poulinières ne peut pas prendre. Maintenant, je préfère me tromper avec mes idées qu’avec les idées d’un autre ; donc je prends quand même des risques. Je tente des choses comme le fait d’avoir fait saillir une fille de Bold Eagle par Face Time Bourbon, dont le produit a malheureusement été victime d’une embolie pulmonaire et que l’on n’a pas pu sauver. L’expérience des prochaines années me dira peut-être qu’il ne faut pas tenter de tels croisements.

Quelle est votre ambition et quel bilan faites-vous trois ans après vos premiers investissements ?
L’ambition est d’avoir des chevaux qui se payent car ce sont des frais constants et prendre un maximum de plaisir, gagner aussi bien sûr de grandes courses. Plus les courses sont belles et importantes, plus la bonne pression est là. Cependant, j’ai autant de plaisir à voir un cheval courir au Croisé-Laroche qui n’est pas très loin de la maison qu’à Vincennes. C’est très compliqué de fixer des objectifs avec du vivant. Je suis bien sûr de très près les investissements, avec des plans financiers que je m’attelle à suivre pour ne pas avoir à faire marche-arrière ou avoir des soucis. Ce qui ne m’empêche pas de prendre le temps avec certains chevaux qui le réclament. Je n’avais pas vraiment d’objectifs clairs en me disant je veux courir ça, je veux avoir ça après trois ans, non. Néanmoins, le bilan est très positif. Tous les chevaux dans lesquels on a investi sont qualifiés et beaucoup ont gagné au moins une course. J’ai des juments et des pouliches qui ont une place toute réservée l’élevage comme Hera d’Atout, la sœur de Gunilla d’Atout et d'Eridan, ou Ixana Griff, une fille de Roxane Griff et Love You. Les perspectives sont donc belles, sur le papier en tout cas, et c’est déjà pas mal.

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