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Actualité - 24.11.2020

Ce « Diable » est une récompense

Parler de consécration pourrait paraître quelque peu usurpé. Mais la victoire de Diable de Vauvert dans le Prix d'Amérique Races ZEturf #1, dimanche dernier, lui ouvre grand les portes de l'épreuve reine et place plus que jamais l'élevage de la famille Lemuet sur le devant de la scène.

Nous sommes en plein cœur de la Normandie du cheval et plus particulièrement encore du trot. Le Haras de Vauvert prend place sur quelque 85 hectares de prairies sur la commune d'Echauffour dans le département de l'Orne. C'est ici que l'histoire de Diable de Vauvert commence. C'est ici que le premier qualifié et futur prétendant au Prix d'Amérique ZEturf 2021 a vu le jour le 29 mai 2013. Il a été élevé au sein d'une structure que Jacques Lemuet a créée et développée dans les années 90, à partir d'une ancienne propriété agricole familiale, avant que Franck, son fils, ne prenne le relais dans l'urgence, il y a quinze ans, à la disparition de son père. 2004 avait été un grand millésime pour l'élevage, avec la deuxième place de Lolo de Vauvert (Biesolo) dans le Critérium des 5 Ans remporté par Lady d'Auvrecy (Dorenzo) et les succès de Lady de Vauvert (Bengali du Loir), à Vincennes notamment, ou encore de Loyd de Vauvert (Eclair de Vandel), à Enghien et en province.
C'est aussi en 2004 que Jacques Lemuet achète yearling Pop Star (First de Retz) lors d'une réduction d'effectif de l'Ecurie des Charmes, à Cabourg, pour une enchère de 5 000 €. « Elle était très bien née, étant par First de Retz et une fille de Mon Tourbillon, descendant de Rosa Bonheur. M. Lemuet aimait bien les souches Viel. Pop Star le lui a bien rendu », rappelait voilà quelque temps Bertrand Le Beller, l'entraîneur de la jument. L'éleveur investisseur a parfaitement raison puisqu'avant d'être dirigée vers le haras où Diable de Vauvert est son deuxième produit, Pop Star s'est révélée une très bonne compétitrice sur les pistes, notamment en remportant le Prix Henri Ballière (Gr. 2) à Caen et en se classant troisième du Prix du Président de la République (Gr. 1) sous la selle de Yoann Lebourgeois. Disparu trop tôt, Jacques Lemuet n'assista pas à cette éclosion.

« Lorsque mon père s’en est allé, il y avait quatre-vingts chevaux sur le haras, où l’on préparait et entraînait, aussi, racontait Franck Lemuet dans le n°2757 de Province Courses l'Hebdo. Ma mère a continué, avec son équipe de salariés. Mais les choses sont vite devenues compliquées, notamment financièrement. A l’époque, il fallait sortir 25 000 à 30 000 € par mois ; or, en regard, les rentrées n’étaient pas suffisantes. Lorsque j’ai repris l’affaire, j’ai donc dû faire un choix, trancher dans le vif. » Franck Lemuet souhaite prolonger l'œuvre de son père mais prend la décision de se concentrer sur l'élevage et procède à une rigoureuse sélection parmi la jumenterie. D'une quinzaine de naissances par an, le Haras de Vauvert passe à une demi-douzaine.

Evidemment, Pop Star fait partie des poulinières conservées et va vite justifier cette confiance. « Diable de Vauvert nous récompense de tous nos efforts », résumait-il avant même la victoire de son champion dimanche tout en décrivant avec ma précision le souvenir de ses premiers pas : « Il s’est mis à trotter derrière sa mère dans des allures impeccables, déjà très « cool », sûr de lui, ne prenant pas le galop, alors que la jument allait vite, pourtant, ayant envie de s’étendre, après avoir gardé le box pendant quelques jours. Dès ce moment-là, il avait un petit quelque chose en plus, qu’il a toujours gardé ». Titulaire d'un doctorat en physique, Franck Lemuet semble pleinement s'épanouir dans la peau de l'éleveur. « Vous savez, l’élevage, que ce soit des chevaux ou d’autres animaux, c’est beaucoup d’observation, d’acuité, d’empirisme, disait-il encore dans ce reportage. L’expérience et l’intuition y sont essentielles. C’est à force de regarder que l’on apprend, que l’on décèle. C’est facile, bien sûr, de dire, après coup, « Je l’avais repéré », mais c’est pourtant vrai et, d’ailleurs, tout éleveur l’aurait fait. » En prolongement, Franck Lemuet n'oublie pas de mettre l'accent sur tout le travail qui a été réalisé autour de Diable de Vauvert pour qu'il s'ouvre les portes du Prix d'Amérique 2021 : « La génétique est importante, évidemment, mais, selon moi, c’est surtout la suite qui compte, le travail derrière ; à l’élevage et, plus encore, à l’entraînement. Après quoi, tout s’enchaîne favorablement et c’est un cercle vertueux qui se met en place ».

Ce cercle vertueux, l'équipe du Haras de Vauvert, emmenée par Franck Lemuet, tente de le répéter autour des produits suivants de Pop Star et de ceux des autres poulinières de l'élevage pour lequel le budget saillies varie chaque année entre 15 000 et 20 000 €. « Je ne suis pas un financier, se définissait encore Franck Lemuet dans les colonnes de Province Courses l'Hebdo. Je reste un éleveur, pour lequel un prix de saillie s’intègre dans un budget d’ensemble, avec ses risques et périls, nombreux, qu’il faut prendre en compte. Je ne peux donc pas tout miser sur une saillie sortant de l’ordinaire, mais mettant mon équilibre en danger, si le résultat n’est pas à la clef, ne serait-ce que concrètement, dans un premier temps, à savoir une jument vide, un poulain mort ou estropié, voire, plus tard, un accidenté. Il faut que je m’inscrive davantage dans la durée et dans la globalité. »
Etalon dont les premiers produits sont foals, Diable de Vauvert, qui entamera l'an prochain sa troisième saison de monte au Haras de Rouffigny, contribue à sa manière à inscrire l'élevage de Vauvert dans cette durée et cette globalité que décrit Franck Lemuet.


Les résultats de Franck Lemuet éleveur en 2020

- 5 chevaux : Diable de Vauvert, Eden de Vauvert, Femto de Vauvert, Furie de Vauvert et Hamlet de Vauvert
- 40 partants
- 7 succès : Diable de Vauvert x 5 (Prix Amérique Races ZEturf #1 - Gr. 2) et Femto de Vauvert x 2
- 234 190 € les gains de courses

L’élevage, c’est beaucoup d’observation, d’acuité, d’empirisme. L’expérience et l’intuition y sont essentielles.
Franck Lemuet

(© ScoopDyga)

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