En 2020, l’activité de l’étalonnage Trotteur a baissé pour la dixième année consécutive. Cette tendance baissière de fond s’est surtout fortement accélérée puisque la baisse de juments saillies s’est élevée à 1 000 unités, soit une diminution de près de 7 % sur 2019. Par effet de bord, cette chute de la demande a eu une répercussion sur le nombre d’étalons sollicités, qui s’est établi à 412 unités (près d’une trentaine de sires en moins par rapport à 2019).
Évidemment, la crise sanitaire intervenue en plein début de saison de monte explique en grande partie ce coup de frein brutal. Et pourtant, le pire a été évité puisque les éleveurs ont toujours eu la possibilité de faire saillir leur cheptel, alors qu’on avait pu craindre le pire, début mars. En résumé, l’essentiel a donc été sauvegardé et de nombreux poulains/pouliches naîtront en 2021 puis pourront alimenter le circuit courses à partir de 2023. Une année «blanche » qui aurait été catastrophique pour la filière a pu être évitée.
12% des étalons couvrent un tiers de la jumenterie !
C’était déjà le cas dans les années 50/70 mais le phénomène s’est accéléré avec l’avènement de l’insémination à partir des années 80, permettant aux étalons les plus en vue, d’aller à la rencontre de 100 juments. Cette avancée technique a eu pour incidence de renforcer la situation de monopole des étalons de tête. On en compte aujourd’hui une cinquantaine (53 précisément en 2020), ayant sailli au moins 90 juments TF dans la saison ; soit un total de 5 197 poulinières représentant 38% du cheptel femelle déclarée sailli à la fin octobre 2020 dans les livres du SIRE.
Ces chefs de file sont, soit des sujets confirmés occupant les premières places du hit-parade des étalons, soit des fils de ces mêmes leaders, soit des « entrants » ayant brillé en piste dans les mois précédant leur entrée au haras et si possible, bien positionnés en terme de rapport qualité/prix.
Ready Cash et ses 17 fils illustrent le premier et le second des propos, ayant tous affiché liste pleine (sans compter leurs prétendantes étrangères), soit un panel de 1 700 juments TF auquel il faut ajouter les 100 juments du « roi » en personne. Si l’on ajoute à cette même lignée mâle les cinq fils de Viking’s Way et un autre fils d’Indy de Vive avec Uriel Speed, on compte 600 juments de plus. Soit 2 400 femelles qui portent dans leurs flancs le sceau du pur trotteur standarbred américain, Mickey Viking.
Face à une telle domination, le chef de race Coktail Jet commence même à avoir un peu de mal à soutenir la comparaison bien qu’il soit représenté par 14 de ses fils, petits ou arrière-petits-fils dans cet aréopage haut de gamme. Et le troisième chef de race à occuper le podium se nomme And Arifant, grâce en particulier à Goetmals Wood et ses meilleurs fils. Cette lignée développée par Jean-Pierre Dubois compte encore dix étalons dans notre Top 50 des sires les plus convoités.
Quels courants de sang alternatifs ont-ils encore droit de cité parmi ces trois forteresses ? On trouve seulement Quadrophenio à deux reprises (Orlando Vici, Un Mec d’Héripré), Bassano (Ni Ho Ped d’Ombrée), Buvetier d’Aunou (Up and Quick) et Gazouillis (Vigove).
Une seconde tranche d’étalons existe, en nombre quasi équivalent (52), ayant sailli entre 50 et 89 juments en 2020, soit 26,2% du panel total de juments présentées à la monte.
Ces deux tranches composées de 105 étalons représentent 8 765 juments, soit près des 2/3 des poulinières saillies cette année.
Le tiers restant des juments présentées se répartit ensuite de la manière suivante :
- 3 143 ont rencontré 104 étalons ayant sailli en moyenne 20 à 49 poulinières
- 1 558 ont rencontré 143 étalons ayant sailli entre 5 et 19 juments
- 158 ont rencontré 60 étalons ayant sailli moins de 5 juments
Enfin, on notera que 52 étalons qui avaient pourtant été l’objet d’une demande d’agrément auprès du SIRE n’ont pas sailli la moindre jument en 2020.
Au total ces 13 624 juments saillies cette saison (ces chiffres ont été arrêtés début novembre) sont en diminution d’un millier sur 2019 (14 626 unités). Les comptages du SIRE faisaient état de 15 304 poulinières saillies en 2018, de 15 521 en 2017, de 15 981 en 2016 et de 16 184 en 2015. Si l’on remonte un peu plus loin dans le temps, ce même recensement relevait 17 278 juments saillies en 2010.
Et il faut remonter à 1985 pour compter moins de 15 000 poulinières saillies alors par 660 étalons. C’est dire si l’économie et le fonctionnement de l’étalonnage ont changé.
La concentration normande
Depuis plusieurs années, de nombreuses voix s’élèvent pour demander l’autorisation du transport du sperme sous forme réfrigérée au-delà de la seule station de monte, afin de limiter les coûts de transport et d’offrir une plus large palette de choix aux éleveurs « décentralisés ».
Loin de la Normandie et du nord des Pays de Loire, les choix s’avèrent en effet extrêmement limités.
A tout seigneur, tout honneur, et à plus forte raison depuis son regroupement entre la « Haute » et la « Basse », la nouvelle région Normandie abrite 216 étalons, soit la moitié de l’offre nationale. L’Orne occupe la première place du podium avec 103 étalons qui y sont stationnés dans 24 établissements différents, devant le Calvados (67 étalons pour 16 haras), la Manche (33 étalons pour 11 sites), la Seine Maritime (10 étalons) et l’Eure et Loir (3 étalons).
Le chef de race Coktail Jet est représenté par 14 de ses fils, petits ou arrière-petits-fils dans cet aréopage haut de gamme.
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