William Dersoir-Habib, d’abord l’envie de performer
Il est l’un des noms et des visages de la jeune génération. William Dersoir-Habib a 23 ans et réalise sa première grande année. Actuellement troisième au classement des meilleurs apprentis montés, il a signé en l’espace de quelques jours des succès importants, dont le dernier et le plus emblématique, avec Fulton dans le Prix Jean-Paul Fairand à Enghien, l’expose en pleine lumière.
Il est originaire de la région parisienne et rien ne le prédestinait à voir son nom un jour inscrit sur les programmes. Pourtant, quelqu’un jouera bien, dans sa prime jeunesse, le rôle de médiateur des courses. "Ce sont mes grands parents, qui vivent en Mayenne, qui m’ont fait découvrir les courses quand, petit, j’allais en vacances chez eux. Nous allions sur les champs de courses de l’ouest, comme Laval, mais aussi jusqu’à Pornichet l’été par exemple." Voilà une nouvelle illustration par l’exemple du rôle des hippodromes dans le recrutement de ses futurs acteurs. "De fil en aiguille, j’ai passé une semaine en vacances chez James Lebouteiller pour découvrir de l’intérieur une écurie", ajoute William Dersoir-Habib. "Je ne savais alors vraiment rien faire. Je n’avais jamais eu de vrais contacts avec les chevaux, ne savais pas monter. C’est à ce moment que j’ai décidé de faire le métier. Et je suis entré à l’école des courses de Graignes dès que j’ai pu, à 14 ans." Le garçon est sur les rails.
Repères sur William Dersoir-Habib
■ 34 victoires au monté (559 courses)
■ 1 victoire à l’attelé (107 courses)
■ 1 Groupe 3 : Prix Jean-Paul Fairand 2024 avec Fulton
Cheval de cœur : Emiliano Bello : "C’est avec lui que j’ai gagné ma première victoire (le 23 juin 2019) et nous avons gagné ensemble six courses."
La grande interview
24h au Trot.- Comment vos parents ont accepté votre décision de vouloir travailler dans les courses ?
William Dersoir-Habib.- Ma mère m’a toujours soutenu et encouragé dans mes choix. Mon père a été plus réservé. Il s’interrogeait et m’a fait comprendre que mon choix n’allait pas vers un métier « traditionnel », de travailler dans un bureau par exemple. Il était d’abord réservé puis, au fur et à mesure de mes années de formation, il a changé son point de vue et m’a soutenu.
Pourquoi le trot ? Vous auriez pu aller au galop ? Cela va encore plus vite ?
W.D.H.- J’ai toujours eu une préférence pour le trot. J’ai vite suivi l’actualité du trot, des chevaux, des jockeys et drivers. Le galop m’intéressait mais sans plus. Je ne m’y suis jamais retrouvé et impliqué autant.
Pourquoi avoir choisi l’école de Graignes alors que vous êtes parisien ?
W.D.H.- C’est l’école qui intégrait les élèves les plus jeunes. A cette époque-là, avant mes 14 ans, je n’avais que les courses en tête et j’étais pressé. C’est aussi simple que cela. À Graignes, j’ai fait la connaissance de gens des courses comme Clément et Théo Duvaldestin et Nicolas Bazire qui avaient quelques années de plus que moi. Je les questionnais dès que je pouvais.
Qu’est ce qui vous a plu dans les courses ? La compétition, la relation avec le cheval, l’esthétique propre aux courses ?
W.D.H.- La compétition. Je pensais courses matin, midi et soir. Je regardais les courses dès que je pouvais. J’étais fan de Matthieu Abrivard. Je regardais toutes ses performances, j’analysais.
Comment êtes-vous entré chez Joël Hallais, votre premier maître d’apprentissage ?
W.D.H.- C’était juste avant mon entrée à Graignes. J’étais en vacances chez mes grands-parents et on le croise en juillet lors d’une réunion à Meslay-du-Maine. Je commençais dans ma tête à penser à un maître d’apprentissage pour mes premiers stages qui commenceraient au mois de mars d’après. Et au culot, avec mon oncle qui nous accompagnait, on lui demande s’il était intéressé par mon profil. Il m’a dit de lui envoyer mon CV à la rentrée. Tout cela s’est fait en deux minutes.
Pourquoi avoir changé d’école et de maître d’apprentissage après vos trois premières années ?
W.D.H.- J’ai décidé de passer mon bac pro à Grosbois tout simplement pour me rapprocher de chez moi. Je suis alors entré chez Colette Chassagne. C’est elle qui m’a fait débuter en courses. Ensuite, je voulais monter toujours plus et c’est pourquoi j’ai proposé mes services à Christian Boisnard qui possèdait un effectif important avec des chevaux montés. C’est chez lui que j’ai fini mon année de bac pro. Je suis ensuite resté chez lui comme salarié pendant quatre ans. Et j’ai intégré l’écurie de Stéphane Bourlier chez qui je suis depuis un an et demi.
Votre actualité est riche. Vous gagnez, êtes sur le podium des apprentis montés. Votre sentiment du moment ?
W.D.H.- Je me dis qu’il faut en profiter. Je vis des très belles années et en suis conscient. Je ne fais pas de plan sur les années à venir pour le moment. Je prends les choses comme elles viennent. Je savoure vraiment d’autant plus qu’il a fallu me faire une place. Je me rappelle de paroles blessantes de quelques-uns à mes débuts qui me disaient que je n’avais pas ma place dans ce métier et me prédisaient que je ne gagnerais jamais une course. Je me rends compte aussi qu’il y a moins d’apprentis montés que lorsque j’ai débuté en courses. Je dirais qu’il y en a un bon quart en moins. C’est aussi inquiétant pour l’avenir et le renouvellement des jockeys et drivers.
Votre préférence va au monté, la discipline où vous évoluez le plus ?
W.D.H.- Le contact avec le cheval n’est pas le même au monté et à l’attelé. Le contact est direct, la proximité très forte. Pour ma part, je dirais que je sens mon cheval deux fois plus et mieux au monté qu’à l’attelé. Et je trouve que les courses sont plus fluides sous la selle. Je trouve que les courses montées sont moins calculées. L’instinct du jockey y a une plus grande part et importance. C’est vraiment la discipline que j’aime le plus.
William Dersoir-Habib, 3e au classement des apprentis montés
(au 16 juillet 2024)
1️⃣ Marius Durville : 152 points
2️⃣ Benjamin Chauve-Laffay : 131 points
3️⃣ Oscar Placier et William Dersoir-Habib : 103 points
©ScoopdygaAvec Grand Trio Ludois Quelques professionnels qui ont jalonné sa carrière
■ Joël Hallais : premier maître d’apprentissage (en 4e, 3e et 1ère année de bac pro) : "Pour moi, c’est le professionnel qui reste le plus attaché à l’école. Il m’a appris les bases et la base du métier. C’est un grand formateur. Des gens comme lui qui transmettent sont de plus en plus rares."
■ Christian Boisnard : "C’est là où j’ai grandi. Il m’a laissé beaucoup de responsabilités et d’autonomie. J’y ai appris les initiatives. Comme on avait beaucoup de chevaux de « récupération », il ne fallait pas hésiter à essayer des choses qui marchaient ou non. Il m’a communiqué le sens de la débrouillardise."
■ Stéphane Bourlier : "Il est le professionnel intégral qui gère tout de A à Z. Il élève et connaît parfaitement ses origines avec des mères ou des grand-mères qu’il a souvent entraînées. Il maîtrise tout son système, de l’élevage, au débourrage, à la qualification, aux courses."
Y a-t-il quelqu’un qui vous inspire aujourd’hui ?
S’il fallait parler d’une course ?
W.D.H.- Ma première victoire avec Emiliano Bello. C’est là que tout commence. Evidemment, la première à Vincennes (avec Djeson d’Ariane en avril dernier) est importante, le premier Groupe (avec Fulton le 10 juillet) aussi mais la première victoire est vraiment spéciale.
Y a-t-il quelqu’un qui vous inspire aujourd’hui ?
W.D.H.- Je reviens au modèle de mon enfance, Matthieu Abrivard. Mais en ce moment, je suis très admiratif de ce que fait Paul Ploquin. Il est désormais devenu un top driver et est toujours un top jockey. Il arrive à se servir de tous les types de chevaux : les freineurs, les tendus. Il est vraiment complet. Il a la capacité à rester froid en course. Il arrive à tempérer les chevaux difficiles auxquels il est associé. On peut encore ajouter qu’il entraîne des chevaux avec son père. J’aime vraiment ce qu’il fait, sa façon de courir.
Les mots de Stéphane Bourlier
Actuel employeur de William Dersoir-Habib, Stéphane Bourlier nous confie : "C’est un garçon sérieux et travailleur qui mérite sa réussite. Un jeune de son profil, qui monte le matin, est précieux dans une écurie. Cela permet d’essayer des chevaux sous la selle que vous ne testeriez pas forcément. Et quand vous avez déjà une personne comme lui dans votre cour, vous n’êtes jamais embêté pour courir au trot monté. Et il faut constater que les apprentis montés ne courent pas les rues actuellement."
William Dersoir-Habib hors piste(s)
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Réseaux sociaux ou jeux vidéos ?
Réseaux sociaux
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Follower ou influenceur ?
Follower
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Le plat dont vous ne vous lassez jamais ?
Une bonne omelette tout simplement
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Un sport que vous aimez bien suivre ?
Le foot mais dans la catégorie des espoirs
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Une personne qui vous inspire ?
Ma mère. Elle m’a toujours soutenu et sait toujours ce qui va ou ne va pas.
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Un voyage ou un pays que vous aimeriez faire ?
Une île du soleil comme Tahiti et la Polynésie.
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Une préférence musicale ?
Pas vraiment. J’aime bien le rap "léger", la R&B, la dance.
©ScoopdygaWilliam Habib-Dersoir avec Djeson d'Ariane