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Actualité - 07.06.2021

Pierre Guenik Un propriétaire au long cours

Sa casaque a fait partie qui de celles qui gagnaient de bonnes épreuves parisiennes au début des années 2000. Pierre Guénik a même été sur tous les fronts à l’époque, en tant que copropriétaire d’Anabaa Blue, le vainqueur du Prix du Jockey Club 2002 à Chantilly. Et puis, ses couleurs se sont faites plus discrètes. Mais, avec Iathus Danica, le propriétaire vient d’enregistrer un deuxième succès cette année. Rencontre.

Ses couleurs bleues, étoiles jaunes, manches et toques violettes, portées par Pierre-Yves Verva, lundi dernier à Amiens, lors de son succès au sulky de Iathus Danica (Obrillant), ne sont pas inconnues. Loin de là. Il s’agit du dispositif de couleurs de Pierre Guenik. Elles ont évolué au plus haut niveau au trot au début des années 2000, notamment grâce à Nijinski Blue (Extreme Dream), Kepler (Capriccio), Ibis Blue (And Arifant), Gatsby (Viking’s Way), Ignace (Blue Dream), Kenitra (Capriccio) et d’autres encore. Avec le premier, Nijinski Blue, Pierre Guenik figure même au palmarès d’un Groupe 1, le Critérium Continental, en 2005. Ses deux succès de 2021 remettent en lumière une casaque qui a enregistré jusqu’à 14 victoires en 2003. Que ce cache-t-il derrière cette sorte de réapparition ? Le propriétaire nous répond d’emblée : « J’avais un peu pris de recul dans les courses en raison de mes engagements professionnels. Et puis, il faut tout simplement dire que j’ai eu une série de mauvais chevaux récemment, pendant des années. Ces dernières années aussi, il faut dire que j’avais plus de chevaux au galop. » Par ailleurs vice-président du Syndicat National des Propriétaires et ce, depuis plus vingt ans, Pierre Guenik nous parle de son parcours dans les courses, de ses passions et de ce qui a changé de son point de vue.

24H au Trot.- Et si on commençait par le présent. Quel est votre effectif actuel ?
Pierre Guenik.- J’ai une poulinière en association qui était une jument que j’avais mais qui ne courait pas sous mes couleurs. Il s’agit de Carla Carelesse qui a un poulain de Earl Simon et est qui est pleine de Helgafell. J’étais allé à Earl Simon avant qu’il ne gagne les Ducs de Normandie. Depuis il a « pété » mais je pense que c’est un bon cheval s’il revient. Ce fait donc deux trotteurs, la poulinière et son foal, auxquels il faut ajouter Iathus Danica qui vient de gagne par deux fois.

Tout a commencé par le trot avec Rostrale d’Orgères
Le premier contact avec les courses de Pierre Guenik est lié à une association sur un cheval « que je n’ai jamais vu courir » nous explique le propriétaire. Il ajoute encore : « J’étais dentiste et j’avais un copain qui soignait un éleveur de trotteurs. À un moment, à la demande de cet ami, on a dû se mettre à douze, beaucoup de dentistes et des amis, pour acheter une jument appelée Rostrale d’Orgères [NDLR : une jument de niveau quinté qui finira sa carrière à 800 000 francs en 1990]. Mais je n’ai pas vraiment accroché et ne l’ai jamais vue courir. À l’époque, je bossais beaucoup et cela ne m’intéressait pas encore. Mais après, un client qui me devait de l’argent me propose de devenir associé sur une jument Elégante de Bouin... Elle était chez Jan Kruithof et ensuite j’ai continué avec lui. On a investi pas mal tous les deux. On a eu des bons résultats et j’ai ensuite profité de plusieurs opportunités pour faire d’autres achats. Voilà comment j’ai déjà fait un tour de l’alphabet des trotteurs. C’était il y a plus de 20 ans. »

Et Iathus Danica, quelle est son histoire ?
Je l’ai acheté foal 4 000 € aux ventes de Caen. J’achète tous les ans à Caen. Je le fais normalement seul. Je regarde le pedigree et le modèle. Concertant Iathus, ce qu’il me plaisait, c’était la mère par Nijinski Blue et sa famille maternelle, celle de Ricimer. Une famille de chevaux durs. Et quand je suis aux ventes, j’observe. Je l’ai fait sortir une fois, je regarde ses aplombs. Et ensuite, j’agis en espion : je regarde les gens qui font sortir les lots que j’ai sélectionnés et je regarde comment ils trottent durant toute la journée. Iathus est toujours parti au trot et est toujours resté au trot. Souvent, les poulains, quand ils sont fatigués, partent au galop. Je me suis dit : « Celui-ci est dur et trotte. » Et c’est ce qu’il a montré pour le moment.

Parlons de votre histoire avec Guy Verva. Vous vous souvenez de ses débuts ?
Cela a commencé avec Victoria Royale (Nijinski Blue). Elle était chez Philippe Mortagne qui n’arrivait pas à s’en servir. Guy Verva me propose alors de la louer. Il s’en est bien sorti avec. Après un bon début de carrière, on l’a vendue. Du coup, je lui mets des poulains régulièrement. Je crois que Iathus est le troisième poulain qu’il a pour moi. Il avait qualifié les deux premiers et on les avait vendus après la qualification. On devait aussi vendre Iathus et cela ne s’est pas fait.

Vous êtes dans une logique acheteur/vendeur ?
Je ne refuse jamais une vente. Je sais que Iathus n’est pas un champion. Si on me propose un petit peu d’argent, je vends. Le concernant, il me semble capable de monter un peu de catégorie. Il devrait aussi pouvoir aller monter. Cela peut nous sauver.

Mais au galop, vous disiez que vous y étiez présent ces dernières années. Où en êtes-vous ?
Je n’ai plus rien. J’ai réussi à tout vendre juste avant la crise de la Covid. Par chance je peux dire. C’est ce que je voulais. J’avais eu un peu de réussite les saisons précédentes et j’avais fait de belles petites ventes. Là, je me retrouvais avec deux ou trois chevaux qui avançaient moyennement. Alors, quand on me propose d’acheter, je suis vendeur, sachant le prix des pensions. Je ne dis pas que je ne reviendrai pas au galop mais, pour le moment, ce n’est pas d’actualité.

Avez-vous transmis votre passion à votre fils ?
Il aimait beaucoup les courses et m’accompagnait. Il aimait le jeu mais ce qu’il l’a fatigué, ce sont les enquêtes et distancements au trot. Depuis, il s’est détourné des courses.

La vente d’une fille de Pine Chip à Jean-Pierre Dubois
Parmi les anecdotes de Pierre Guenik, il en est une qui peut surprendre. Alors propriétaire de Guenica d’Orgères (Podosis), dont il était aussi l’éleveur, Pierre Guenik l'a fait saillir par l’étalon standarbred Pine Chip. Jean-Pierre Dubois voit le produit, appelle Pierre Guenik et lui dit : « Vous avez une belle pouliche de Pine Chip. Vous voulez la vendre ? ». Ni une, ni deux entre ces deux personnalités du commerce, la pouliche est achetée par JPD. Nommée Lachipy et inscrite au stud-book italien, la pouliche ne courra pas. Guenica d’Orgères aura d’autres produits étrangers, notamment suédois, dont Janne Sisu 1’12’’ (Dream Vacation), à la tête de 7 victoires.

Zoom sur deux trotteurs étrangers
Cantare (Super Arnie) : 403 432 €
The Big Blue World (Copiad) : 269 735 €
Concernant les chevaux étrangers dont il a été propriétaire ou copropriétaire, Pierre Guenik nous apprend : « À l’époque, j’allais beaucoup à l’étranger. Je me déplaçais. Quand j’y allais, il n’y avait pas de concurrence, ce qui fait qu’on ne payait pas les chevaux très chers. Maintenant, tout le monde connaît le filon. Depuis, les Suédois ont vu qu’il y avait de l’argent à gagner en France. Ou ils viennent par eux-mêmes ou ils vendent très cher. Tout a changé. »


The Big Blue World sous les couleurs de Pierre Guenik en 2006.

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Qui est Pierre Guenik ?
■ 67 ans
■ Dentiste de formation, il a créé une société de vente de matériels dentaires, dans le segment haut de gamme. « Je vends aux dentistes des matériels comme des loupes binoculaires, des caméras microscopes. Du matériel pointu. Mon fils travaille avec moi et va prendre la suite. »

Pourriez-vous partager votre sentiment sur l’actualité des courses ?
Je pense qu’il faut refonder quelques jeux. Je suis un peu joueur personnellement mais je pense que c’est en cours. Il faut restructurer le Quinté. Je crois savoir qu’il y a un nouveau jeu en ligne qui va sortir. C’est une bonne idée. Il regarder ce qui marche bien à l’étranger comme le V75 en Suède. Pour ma part, j’aime bien jouer au Quinté. Pourquoi ne pas un lancer un jeu événementiel le dimanche par exemple ? Du genre sexté, avec une cagnotte. Il faut ramener des gens sur les hippodromes, aux jeux aussi. Je ne vais pratiquement plus aux courses. Je trouve qu’il n’y a plus d’ambiance. Évidemment, la Covid n’a pas arrangé les choses mais, déjà avant, c’était devenu triste. Quand, j’ai des chevaux qui courent, je me déplace. J’ai vu toutes les courses de Iathus Danica et même sa qualification.

Vous avez toujours acheté en association au final. Quel souvenir de vos achats [lire par ailleurs l’achat de Nijinski Blue] pourriez-vous partager ?
À l’époque de la séparation en trois de l’effectif Levesque, je suis allé avec Jan Kruithof pour acheter quatre chevaux. Jan les a essayés et on acheté Ignace (Blue Dream), Kenitra (Capriccio), Kepler (Capriccio) et Marengo (Cezio Josselyn). Ignace avait déjà des gains et on a souffert avec lui mais Jan Kruithof l’avait fait gagner à Vincennes avec Jean-Michel Bazire. Avec Kenitra et Kepler, on a évidemment connu de grands moments. Quant à Marengo, il était un vrai espoir. Il était tout bon. S’il n’était pas mort tôt, il aurait pu devenir un cheval de premier plan.

Nijinski Blue : merci fiston
Parti acheté un poulain chez Michel Donio, le bien né Nononito Blue (Coktail Jet), un fils de Fangala et frère de Mandarino Blue (356 350 €), Pierre Guenik reviendra avec deux achats. « Nijinski Blue, je l’ai acheté grâce à mon fils. Moi, jamais, je ne l’aurais retenu. J’allais acheter dans les « N » (année 2001) la moitié de Nononito Blue, que je devais payer cher, quand Michel Donio me dit : « Prends l’autre qui est avec lui dans les prés, il ne fait que trotter ». Je ne voulais pas. Mon fils me dit : « Prends-le, il est gentil, il vient vers nous. » Michel Donio m’a fait un prix pour les deux (pour leur moitié) et j’ai acheté les deux. Sans mon fils, je ne le prenais pas. » Nononito Blue n’a jamais couru et Nijinski Blue est devenu vainqueur classique. « Comme quoi, il n’y a pas de malin. »

Pierre Guenik en 2005 avec Nijinski Blue et Yves Dreux

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La victoire

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