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Actualité - 29.10.2021

Emploi et formation au premier rang des priorités

C'est l'un des sujets les plus importants du moment qui traverse l'ensemble des composantes de la société française. Comment attirer la jeunesse dans ses formations et la faire entrer au service d'une filière comme celle des courses, et du cheval plus globalement ? Les sociétés-mères ont décidé d'en faire une priorité et créé pour cela une nouvelle direction Emploi et Formation confiée à Guillaume Herrnberger. Cette direction aura en charge l'AFASEC.

Les difficultés croissantes rencontrées par les structures d’élevage et d’entraînement à recruter et fidéliser leur personnel se multiplient. Comme d'autres secteurs, le bâtiment ou la restauration, l'attractivité des courses est en souffrance. Voilà pourquoi les Présidents des sociétés-mères, Jean-Pierre Barjon (LeTROT) et Edouard de Rothschild (France Galop), ont décidé de placer le thème de l’emploi et de la formation au cœur des enjeux à venir avec la création d'une nouvelle Direction au sein de l'institution dédiée à cette mission. Confiée à Guillaume Herrnberger, spécialiste de la gestion des ressources humaines, elle se voit attribuer un large spectre de missions, en relation avec la formation et l'emploi.

Repères sur la formation et l'emploi dans la filière courses
■ 900 formés par an (tous organismes confondus) arrivent sur le marché du travail dont 120 diplômés par l'AFASEC
■ 4.100 salariés dans la filière avec un turnover de 22 % soit 900 personnes qui quittent les entreprises hippiques par an
■ 250 postes restent actuellement vacants dans les entreprises de la filière courses

Guillaume Herrnberger : « On est passé d'un marché de l'employeur à celui du candidat »
C’est principalement par une meilleure définition des besoins des socioprofessionnels, par un élargissement des sources de recrutement et par un renforcement de l’outil de formation existant au sein de l’AFASEC (Association de Formation et d’Action Sociale des Ecuries de Courses), que la nouvelle direction sera en mesure de répondre aux demandes des professionnels des courses et ainsi satisfaire les 250 postes restant vacants à ce jour. Guillaume Herrnberger vient de prendre cette nouvelle direction. Sa prise de fonction date du 4 octobre et le spécialiste de l'emploi s'approprie à grands pas toutes les clés d'analyse et de compréhension de la filière. « La phase de découverte d'appropriation » permet au directeur, spécialiste de la gestion des ressources humaines et des problématiques de l'emploi et de la formation, de dresser une première photographie de la filière.

24H au Trot.- D'abord, quels sont vos premiers constats ?
Guillaume Herrnberger.- Le challenge clair donné par les maisons-mères à l'AFASEC dans ses nouvelles versions est de ne plus simplement penser la formation et l'action sociale dans leurs contenus - qu'il fait bien - mais de dire que cette formation et cette action sociale doivent être au service de l'emploi. On connaît une tension sans précédent sur le marché de l'emploi avec un taux de chômage au plus bas depuis dix ans. On est passé d'un marché de l'employeur à celui du candidat. C'est particulièrement visible chez nous, dans la filière courses. On a 4.100 employés dans les écuries de courses, avec un taux de turnover annuel de 22 % (contre 15 % à l'échelle nationale). C'est 900 employés qui tous les ans quittent le système des courses. Il faut donc réattirer. Si j'utilise une image, je dirais que la baignoire se vide plus vite qu'elle ne se remplit. On arrive encore à peu près à remplacer les 900 qui partent mais on ne fait plus croître les effectifs là où il y a un enjeu de croissance et de besoin. Voilà pourquoi il y a actuellement 250 offres d'emplois qui sont actuellement non pourvus sur Equiressources dans le segment hippique.

Côté formation, où en est-on ?
Les chiffres de l'AFASEC parlent d'eux-mêmes. Nous avons cent étudiants de moins cette année inscrits qu'il y a cinq ans. Tous les ans, on en perd 20. Il faut arrêter cette hémorragie de toute urgence et ré-inverser le sens des courbes dès l'année prochaine. Sur les 900 formés dans la filière hippique par an, 120 sortent de l'AFASEC car il y a d'autres acteurs de formation comme les MFR, les CFA des établissements publics et privés de l'enseignement agricole.

Le constat sur la baisse d'attractivité est-il partagé par les autres acteurs de la formation hippique ?
Tout à fait. C'est aussi pour cela que j'ai entamé des échanges avec tous les autres acteurs. Nous avons besoin de mener un travail collectif. Nos concurrents ne sont pas ceux qui attirent d'autres élèves dans les formations hippiques et équestres. Nos concurrents pour la filière cheval sont les logisticiens, qui recherchent des profils de conducteurs ou caristes, l'hôtellerie et la restauration, le BTP. Il faut redorer l'image de la "marque employeur" de la filière des courses.

Comment définir cette marque employeur ?
C'est l'image qu'une personne externe va avoir de notre univers et de notre industrie. Il ne faut pas avoir peur de mettre en avant la beauté et le sens qu'ont nos métiers. On ne fait pas des métiers pénibles. On fait des métiers exigeants car on est dans l'univers de la compétition et du dépassement. Sur ces éléments de discours, il faut aller sourcer les bonnes personnes. Oui, il y a d'importantes d'heures de travail mais tout se fait avec du sens. Il y a dans une écurie de trot, par exemple, une diversité de tâches et une obligation à la réflexion qui donnent du sens aux métiers. Et on entend beaucoup en sortie de Covid des gens qui disent : « Je cherche un métier qui a du sens, à retrouver le contact avec mes racines. » Quand vous travaillez avec du vivant comme dans les écuries, chaque jour est différent du précédent. On doit travailler sur cet ADN avec l'ensemble de la filière. Je pense aux MFR, aux CFA, aux entraîneurs, etc.

Mais l'environnement change et les aspirations des jeunes aussi ?
C'est vrai, c'est un état de fait. À nous de faire évoluer nos métiers et notre management. On doit dorénavant donner les clés à un entraîneur pour manager. Quand vous perdez chaque année 22 % de vos employés, contre 15 % au niveau national, c'est qu'il y a un problème. Les dernières enquêtes de l'IFCE sur les personnes qui sortent des courses citent en premier les problèmes de reconnaissance. Plus que la rémunération ou les conditions de travail. Il faut que nous formions les chefs d'entreprise des courses à être managers. Il faut aussi donner de la perspective aux salariés.


Il faut redorer l'image de la "marque employeur" de la filière des courses.
Guillaume Herrnberger

© DR
Le parcours de Guillaume Herrnberger
Diplômé d’EM Lyon, Guillaume Herrnberger est également titulaire d’un MBA Ressources Humaines (RH) & Transformation de l’IMD Business School de Lausanne. Spécialiste de la gestion des ressources humaines, cofondateur et directeur général Europe de Skills Principals (plateforme de conseil dédiée aux débouchés d’emploi et à l’écosystème RH pour les entreprises), il a auparavant collaboré plus de huit ans au sein du Groupe Adecco occupant successivement les rôles de directeur des projets stratégiques, puis de la rémunération et des avantages sociaux, et enfin du développement digital avant de lancer une solution pour l’emploi des travailleurs indépendants au sein des grandes entreprises. Ses expériences en font un spécialiste des domaines de la restauration et du BTP. Depuis le 4 octobre 2021, il est directeur de l’Emploi et de la Formation de l’institution des courses, en charge de l’AFASEC.

Qu'entendez-vous par perspective ?
On doit favoriser les parcours professionnels. Que fera un cavalier d'entraînement ou lad-driver dans cinq ans ? Pour ceux qui veulent le rester dix, quinze ou vingt ans, pas de problème mais pour les autres, il faut faire en sorte qu'ils (elles) ne quittent pas notre industrie. Il faut réfléchir à des vrais parcours de formation et de responsabilité pour attirer les jeunes. Et il y a dans les courses beaucoup de parcours très inspirants et exemplaires.

Parlons plan d'actions : sur quelles premières pistes comptez-vous vous lancer ?
Il faut déjà commencer par réunir tous les acteurs de la formation de la filière des courses. Pour que nous nous parlions vraiment et puissions travailler ensemble. Il y aura notamment à travailler sur un maillage territorial entre l'AFASEC et les autres acteurs de formation. On est souvent complémentaires et on sera plus forts à travailler ensemble pour attirer des jeunes. J'ai rencontré et je vais continuer à rencontrer très vite tous les acteurs des courses, au trot au galop, élus socioprofessionnels, pour travailler avec eux. Au trot par exemple, il faut qu'on donne les clés aux professionnels et aux bonnes personnes cibles (leurs épouses par exemple) pour moderniser les entreprises des courses. Tout cela s'appelle la formation continue qui n'est pas assez présente dans les courses. Et ces formations peuvent se faire avec des moyens modernes, avec des parties en distanciel.

Se pose la question du comment ? Comment et avec qui entreprendre ces actions ?
On a déjà à notre service un outil formidable et qu'il faut « remettre au centre du village » qui s'appelle l'AFASEC. Que l'on dote de nouvelles missions, un AFASEC que l'on élargit. Il faut déjà capitaliser sur notre marque employeur et tout ce que fait l'AFASEC en termes de formation et d'actions sociales. Trop ignorent l'attractivité de la filière par ses actions sociales. L'AFASEC, c'est 600 étudiants par an en formation sur ses cinq sites.

Des axes de travail ?
Il va falloir se rendre plus attractif dans le domaine de la formation. Gagner la bataille du terrain auprès des étudiants, contre le BTP, la restauration, avec la chance d'offrir des formations qui garantissent un emploi derrière ! L'AFASEC peut accueillir une centaine d'étudiants en plus par an. Sur le volet de l'emploi, avec les 250 postes qui sont actuellement ouverts dans les courses, il va falloir travailler sur nos réseaux. Est-ce qu'on travaille de concert avec les Pôles Emploi ? Avec les Missions Locales ? Et il faut avoir une approche nationale. Quant aux actions avec les employeurs dont j'ai déjà parlé, elles doivent nous permettre de réduire l'hémorragie de nos métiers. Il faut réduire notre turnover. Le faire passer de 22 % à moins de 20 %, à 17 %... C'est un gain immédiat pour l'ensemble de la filière. Il y aussi la possibilité de faire reconnaître nos métiers en tension et là, on a le soutien de l'IFCE et du Ministère de l'Agriculture. Cela peut nous permettre de recruter des travailleurs étrangers, hors Union Européenne, et, à très court terme, mettre un sparadrap sur notre hémorragie. Je ne dis pas que c'est une solution pérenne mais cela peut répondre aux difficultés présentes des employeurs à la recherche de salariés. Cela pourrait être une soupape d'oxygène pour se laisser le temps de former correctement les salariés de demain en France. Voilà quelques pistes de plan d'actions.

Repères sur l'AFASEC
Le budget annuel de l’AFASEC, de 29 millions d’euros (en 2020), est financé à 60 % par les sociétés-mères et à 40 % par d’autres bailleurs de fonds notamment publics. Dans la contribution des sociétés-mères à l’AFASEC, 40 % sont destinés à la formation, 45 % à l’action sociale et 15 % aux investissements et au fonctionnement résiduel de l’AFASEC.
■ 600 étudiants sur ses 5 sites
■ Effectif de l'AFASEC : 270 salariés

L'avis de Patrick David - LeTROT
Membre du Conseil d'Administration de la société-mère du Trot, Patrick David nous parle de l'emploi. « L’emploi doit être placé au premier niveau de nos priorités, autant que la recherche de nouveaux propriétaires et le maintien du nombre d’éleveurs. C’est crucial pour l’avenir. On constate un turnover bien trop élevé et nous avons tout intérêt à inverser cette tendance qui a des conséquences sur la stabilité et les performances de nos écuries de courses. Nous avons identifié trois axes de travail :
■ une meilleure définition des besoins dans une écurie pour atteindre les filières de recrutement, travailler sur les conditions de travail et d’hébergement en s’inspirant par exemple de ce qu’ont fait les secteurs du bâtiment et de la restauration ;
■ offrir des possibilités de formation continue aux managers qui doivent aussi être des formateurs ;
■ enfin, je souhaite qu’on réfléchisse à des actions visant à récompenser et féliciter les jeunes et plus généralement les employés d’écurie sans attendre que l’un d’entre eux soit un jour Étrier d’Or ou meilleur apprenti. Il y a des talents à tous les échelons. »

Sensible à un événement de ce genre, l’équipe de Province Courses ne saurait trop conseiller sur ce dernier point de s’inspirer des Trophées du Personnel des courses et de l’élevage Godolphin - France Galop.

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