Harlem de Bucy, celui que l’on n’attendait pas
Harlem de Bucy 1’10’’ est la principale révélation de l’hiver, à la faveur des quatre succès qu’il y a signés et, plus encore, de sa place de deuxième dans le Prix de Paris Marathon Race (Groupe 1), où il a donné la meilleure des répliques à la championne de Fabrice Souloy, Ampia Mede Sm. Il sera revu en piste, samedi, à Vincennes, dans le Prix Jean Cabrol. L’occasion, pour nous, de revenir sur l’itinéraire atypique de cet élève d’Alain Marie, loué à l’Ecurie Brindor et s’exprimant sous l’entraînement de Christophe Ecalard.
Bâti pour faire un cheval d’âge
A l’aube de ses 6 ans, Harlem de Bucy (Lilium Madrik) n’a couru qu’à vingt-cinq reprises, ce qui n’est pas beaucoup, à cet âge. C’est qu’il a été économisé, parfois un peu par la force des choses, eu égard aux circonstances, mais également dans l’esprit d’en faire un cheval d’âge, ce à quoi son gabarit, tardif et imposant, le prédisposait. Animateur de l’Ecurie Brindor, Olivier Réglade détaille le parcours du fils de Lilium Madrik : "Le cheval est arrivé chez nous autour de l’âge de 18 mois. Selon notre habitude, nous l’avons débourré, puis remis au pré, d’autant que, physiquement, il n’était pas venu, même s’il s’annonçait beau."
Harlem de Bucy, en bref
■ Eleveur : Alain Marie.
■ Propriétaire : Ecurie Brindor.
■ Entraîneur : Christophe Ecalard.
■ Carrière : 25 sorties, 10 victoires (Vincennes x 5, Bernay, Cabourg, Caen, Le Mans, Saint-Omer), 8 places dans les cinq premiers (deuxième du Prix de Paris, Groupe 1).
■ Record : 1’10’’9.
■ Gains : 281.370 euros.
La suite a d'abord été limpide, continue Olivier Réglade :
"Quand on l’a repris, il a tout de suite montré de la qualité, mais aussi un peu de caractère. Nous l’avons bien qualifié, à Caen, dès le mois de mai de ses 2 ans. Après quoi, il a eu un passage à vide et est retourné à l’herbage." Ainsi
Harlem de Bucy ne débutera-t-il en compétition qu’à 3 ans, au cours de l’été, occasion d’un premier succès sur l’hippodrome normand de Bernay :
"Les choses commençaient bien, reprend Olivier Réglade.
Mais cela ne devait pas durer, car, lors de sa sortie suivante, à Dieppe, le poulain s’accidentait, rentrant boiteux, victime d’une fêlure du canon. La piste n’était pas très belle, ce jour-là, et puis Harlem était dans une phase de croissance."
Tout sauf un long fleuve tranquille !
Une longue interruption de carrière s’ensuit, au cours de laquelle Harlem de Bucy reste un bon moment au box, pour réparer sa fêlure, puis est progressivement repris. On le revoit en course au printemps 2021. Il a désormais 4 ans et aligne les bons résultats, se plaçant, puis gagnant à Saint-Omer, au Mans et à Cabourg. Au cours du meeting d’hiver qui suit, il ouvre son palmarès à Vincennes, avant de s’imposer à Caen, au mois de mars. "
Sa progression, à 4 ans, avait, cependant, été ralentie par une fêlure de la hanche, qu’il s’était faite au paddock, relate Olivier Réglade.
Voyez que son épanouissement n’a pas été un long fleuve tranquille ! C’est un cheval lourd et important, un grand modèle. Il a fallu savoir le ménager, ce que nous avons fait, du reste, une bonne partie de l’année dernière. Il a fait chaud, très chaud, du printemps à l’été, et nous avons choisi de faire l’impasse, de le laisser tranquille. Nous visions Vincennes et son meeting d’hiver."
"On pense déjà aux quatre "B" du prochain meeting et à une qualification pour le Prix d’Amérique Legend Race !"
Olivier Réglade
Première sortie à Vincennes le 21 février 2022 récompensée d'une victoire
© ScoopDyga Olivier Réglade et l’Ecurie Brindor
Avant l’avènement d’Harlem de Bucy, Brindor 1’10’’ (Mage de la Mérité), le bien nommé, était le représentant le plus marquant de l’écurie d’Olivier Réglade (N.D.L.R. : "Or", comme les initiales de celui-ci, O. R.), du haut de ses quinze victoires et de ses 330.000 euros de gains. Informaticien en région parisienne pendant de longues années, Olivier Réglade passe, aujourd’hui, l’essentiel de son temps dans son haras normand, basé à Gouttières, au Mesnil-en-Ouche, dans le département de l’Eure. Il est installé dans l’ancien domaine du regretté Jean Maizeret – l’éleveur des "Mérité" –, où il a, à la fois, son élevage et son centre d’entraînement, animé par Christophe Ecalard.
De la tenue et de la vitesse, assorties d’une grande dureté
Après deux parcours de remise en route, aux soins de son fidèle partenaire du matin, Rodolphe Douyère, et une troisième place à Laval, sous la poigne de Franck Nivard,
Harlem de Bucy retrouve Vincennes à l’automne, en prélude à ce qui va être l’hiver de sa révélation. Redonnons la parole à son propriétaire :
"On l’a d’abord laissé monter tranquillement en puissance. Mené par Franck Nivard, il s’est placé deux fois, en venant de derrière. Lors de la troisième course de son meeting, sur les 2.100 mètres, autostart, il tire un mauvais numéro derrière la voiture, à savoir le 16, et, dans ces conditions, Franck lui préfère un autre cheval. Pour le remplacer, nous faisons appel à Alexandre Abrivard, qui le découvre… et qui gagne ! Son chrono s'affiche à 1’10’’9 ce jour-là, record personnel pulvérisé ! Après, les succès se sont enchaînés, sur toutes les distances. C’est un cheval qui sait tout faire. Il a de la tenue, mais aussi de la vitesse et, surtout, beaucoup de dureté."
Le clin d’œil du destin
En prolongement de ses quatre victoires consécutives, enregistrées de décembre à février,
Harlem de Bucy va donc prendre part au Prix de Paris Marathon Race, passant des courses de série – "D", puis "C" et "B" – à un Groupe 1 ! Un pari un peu fou, tenté sans complexe par son entourage :
"Le cheval était très bien et nous n’avions rien à perdre, confirme Olivier Réglade.
Mais nous y allions pour prendre une allocation. Alexandre Abrivard n’était pas très chaud, a priori. Aussi, nous ne lui avons mis aucune pression, lui donnant carte blanche et le laissant improviser, en sachant qu’il allait faire pour le mieux. Le Prix de Paris est, souvent, une course de pilotes. Cela a encore été le cas cette année. Alexandre a fait un faux train et ses adversaires l’ont laissé faire, ne croyant pas trop en les chances de son cheval. Mais celui-ci est reparti sous les attaques et a remis un coup de reins. Il a même failli gagner. Clin d’œil du destin, Franck Nivard a eu chaud, au sulky d’Ampia Mede Sm !"
Et maintenant ?
Harlem de Bucy est, dorénavant, agréé comme étalon, mais il ne fera pas la monte avant le printemps 2024 :
"Il devrait intéresser les éleveurs, poursuit l’homme de l’Ecurie Brindor,
car il a un pedigree plutôt outcross, sortant des sentiers battus, hors Ready Cash et Coktail Jet, avec assez peu de sang américain. Toutefois, pour l’heure, nous voulons nous concentrer sur sa carrière de compétiteur. À 6 ans, le cheval est tout neuf, mais, par voie de conséquence, il a besoin de prendre des gains, ayant moins de 300.000 euros au compteur. Il a très bien récupéré de son Prix de Paris et a deux courses fermées à son programme, fin mars et fin avril. Ensuite, si tout va bien, il courra régulièrement. Le but est de le monter en gains, dans la perspective de l’hiver prochain. On pense déjà aux quatre "B" et à une qualification pour le Prix d’Amérique Legend Race !"
Quand Harlem de Bucy donne chaud à Ampia Mede Sm dans le final du Prix de Paris Marathon Race
© ScoopDyga